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vissement, ils forment entre eux une association, sanctionnée par un pacte terrible, proclament la liberté de la mer ; s’affranchissent de toute obéissance étrangère, déclarent ne reconnaître d’autres maîtres qu’eux-mêmes, d’autre loi que leur volonté ; adoptent le drapeau aux trois couleurs, bleue, blanche, rouge ; et, fièrement groupés autour de cet éclatant symbole de liberté, défient le monde entier.

Bientôt, comme un vol de vautours, ils s’abattent sur les vaisseaux qui sillonnent l’Atlantique, accomplissent des exploits inouïs et qui dépassent toute croyance ; s’emparent des deux tiers de la riche et florissante île de Saint-Domingue, dont ils font leur quartier général ; fondent une magnifique colonie ; se gorgent de richesses, et en moins de deux ou trois ans, se rendent si redoutables, que les rois les plus puissants recherchent leur alliance, et traitent avec eux d’égal à égal.

Maintenant quels étaient ces hommes ? quel but se proposaient-ils ?

On les a présentés comme des hommes féroces ayant à peine figure humaine ; ne se plaisant que dans le meurtre, l’incendie, le carnage ; dominés par la cupidité et pour lesquels l’or était tout. En un mot, on en a fait une horde de brigands infâmes, enivrés par la passion de l’or ne recherchant que les orgies brutales, les jouissances matérielles et versant le sang comme de l’eau, pour satisfaire leurs instincts ignobles et carnassiers.

À notre avis tout cela est faux ; les flibustiers ont été méconnus ou, pour mieux dire, on ne les a jamais compris.

Les flibustiers étaient des hommes dans toute la large acception du mot ; avec tous les vices et toutes les vertus de l’espèce.

Leur nom est resté célèbre sur toutes les plages américaines. Ils ont laissé de nombreux successeurs, aussi énergiques et aussi entreprenants qu’ils l’ont été jadis. Ces aventuriers aujourd’hui disséminés et livrés à leurs