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Le général Ventura, réveillé en sursaut, se dressa tout effaré sur son lit, en fixant sur l’importun un regard qui, d’abord courroucé, se fit presque immédiatement inquiet à l’aspect des traits décomposés de l’homme qui arrivait.

— Que se passe-t-il, capitaine don Lopez ? demanda-t-il en cherchant vainement à assurer sa voix qui tremblait, malgré lui, par l’effet d’un pressentiment secret.

Le capitaine don Lopez était un soldat de fortune qui avait blanchi sous le harnais, et avait contracté au service une espèce de franchise brutale qui l’empêchait de farder la vérité, n’importe dans quelle circonstance ; ce qui, aux yeux du général, le faisait passer pour une espèce d’oiseau de mauvais augure.

L’arrivée du capitaine avait donc doublement inquiété le général, d’abord à cause de son visage défait, ensuite pour la réputation dont il jouissait.

À la question que le gouverneur lui adressa , le capitaine répondit laconiquement ces trois mots tout gonflés d’orage :

— Rien de bon.

— Comment, rien de bon ! Le peuple se serait-il révolté ?

— Ma foi non ; je ne crois même pas qu’il y songe.

— Eh bien alors, fit le général tout ragaillardi par cette bonne nouvelle, que diable me venez-vous conter, capitaine ?

— Je ne vous viens rien conter du tout, fit l’autre d’un ton bourru ; il y a là un soldat qui arrive je ne sais d’où, et qui veut absolument vous parler. Faut-il l’introduire, ou bien vais-je le renvoyer ?