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la campagne, silence troublé seulement par ces bruits sans cause connue que l’on entend dans les savanes, et qui semblent être la respiration du monde endormi.

Tout à coup, dans le calme, la hulotte bleue chanta à deux reprises différentes ; son chant plaintif et doux résonna mélodieusement dans l’espace.

— Eh ! fit un des dragons en s’adressant à son voisin, voilà un oiseau qui chante bien tard.

— Mauvais augure ! répondit en hochant la tête celui auquel on s’adressait.

Canarios ! de quel augure parlez-vous, compadre ?


— J’ai toujours entendu dire, reprit gravement le second interlocuteur, que lorsque la nuit l’on entend un oiseau chanter à sa gauche, cela porte malheur.

— Que le diable vous confonde, vous et vos pronostics !

En ce moment le chant de la hulotte bleue, qui la première fois s’était fait entendre à une distance assez éloignée, retentit avec une nouvelle force ; il semblait s’être sensiblement rapproché et partir des arbres situés sur la lisière du chemin que suivaient les dragons.

L’alferez s’arrêta en levant la tête, comme s’il eût, bien que son esprit fût ailleurs, cherché machinalement à se rendre compte du bruit qui frappait ses oreilles, mais tout rentra dans le silence ; il secoua la tête et reprit sa conversation.

Le détachement était parti depuis plus d’une heure. Pendant cette longue promenade, les soldats n’avaient rien découvert de suspect ; quant au guide qu’ils cherchaient, inutile de dire qu’ils ne l’avaient pas trouvé, ils n’avaient pas rencontré âme qui vive.