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— Et moi ! murmura Fray Ambrosio d’une voix sourde, en étanchant le sang qui souillait son visage.

— Hum ! c’est égal, dit à part lui Andrès Garote, cette famille de Zarate est une belle famille ; mais, caraï ! il faut avouer que don Pablo est un rude homme.

Le digne ranchero était le seul que le hasard avait assez favorisé dans cette rencontre pour qu’il s’en tirât sain et sauf.


III.

Les Chasseurs.

À deux lieues au plus de Santa-Fé, dans une clairière située sur le bord de la petite rivière qui borde la ville, le soir du même jour un homme était assis devant un grand feu qu’il entretenait avec soin, tout en s’occupant activement des préparatifs de son souper.

Frugal repas, du reste, que ce souper ! Il se composait d’une bosse de bison, de quelques patates et de tortillas de maïs cuites sous la cendre, le tout arrosé de pulque.

La nuit était sombre, de gros nuages noirs couraient lourdement dans l’espace, interceptant parfois les rayons blafards de la lune, qui ne répandait qu’une lueur incertaine sur le paysage noyé lui-même dans un flot de ces épaisses vapeurs qui, dans les pays équatoriaux, s’exhalent de la terre à la suite d’une chaude journée.

Le vent soufflait violemment au travers des arbres dont les branches s’entre-choquaient avec des râles plaintifs, et dans les profondeurs des bois les miau-