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Si nous ne craignions de nous laisser entraîner dans de trop longues digressions, nous pourrions rapporter ici de curieuses anecdotes à ce sujet.

Le père Séraphin s’était attiré l’amitié et le respect de tous ceux avec lesquels le hasard l’avait mis en rapport.

Charmé de rencontrer un compatriote au milieu de ces vastes solitudes si éloignées de cette France qu’il n’espérait plus revoir, il s’était étroitement lié avec Valentin, auquel il avait voué une profonde et sincère amitié.

Pour ces mêmes motifs, le chasseur, qui admirait la grandeur du caractère de ce prêtre si plein de véritable religion, s’était senti entraîné vers lui par un penchant irrésistible.

Souvent ils avaient fait de longues courses ensemble, le chasseur guidant, à travers les déserts désolés de l’Apacheria, son ami vers les tribus indiennes.

Dès que le père Séraphin eut pris place auprès du foyer, la Plume-d’Aigle et Curumilla se hâtèrent de lui rendre tous les petits services qu’ils crurent lui devoir être agréables, et lui présentèrent quelques morceaux de venaison rôtie avec des tortillas de maïs.

Le missionnaire se prêta avec une joie douce au manège des deux chefs et accepta ce qu’ils lui donnèrent.

— Il y a bien longtemps que nous ne vous avons vu, mon père, dit l’hacendero ; vous nous négligez ; ma fille me demandait encore de vos nouvelles il y a deux jours, elle a hâte de vous voir.

— Doña Clara est un ange qui n’a pas besoin de moi, répondit doucement le missionnaire ; j’ai passé près de deux mois au milieu de la tribu comanche de la