Page:Aimard - Le Chercheur de pistes, 1860.djvu/120

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sur le canon, et, après avoir jeté un regard louche à ceux en face desquels il se trouvait :

— Que le diable vous emporte, señor padre ! dit-il brusquement au moine d’une voix rauque ; me voici, que me voulez-vous ?

Loin de se fâcher à cette interpellation brutale, celui-ci sourit au colosse et lui tendit la main en lui répondant gracieusement :

— Soyez le bienvenu, Cèdre-Rouge, nous vous attendions avec impatience ; asseyez-vous ici à côté de moi sur cette butaque, tout en buvant un verre de pulque, nous causerons.

— Le diable vous torde le cou et que votre pulque maudit vous étrangle ! Me prenez-vous pour un chétif avorton de votre espèce ? répondit l’autre en se laissant tomber sur le siége qui lui était offert. Faites-moi servir de l’eau-de-vie et de la plus forte ; je ne suis pas un enfant, je suppose.

Sans faire la moindre observation le moine se leva, alla parler à l’hôte et revint avec une bouteille de liqueur dont il versa une large rasade au vieux chasseur.

Celui-ci vida son verre d’un trait, le replaça sur la table en faisant entendre un hum ! sonore, et se tourna vers le moine en grimaçant un sourire.

— Allons, vous n’êtes pas aussi diable que vous êtes noir, señor padre, dit-il en passant sa manche sur sa bouche pour essuyer sa moustache, je vois que nous pourrons nous entendre.

— Il ne tiendra qu’à vous, Cèdre-Rouge, voici deux braves chasseurs canadiens qui ne veulent rien faire sans votre concours.

L’Hercule jeta un regard louche aux jeunes gens.