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— Merci. Maintenant, quant à ce qui vous regarde personnellement, je vous laisse libre de nous quitter ou de nous suivre, à votre volonté ; mais d’abord il nous faut des chevaux, des armes et surtout une escorte. Je ne me soude nullement de retomber entre les mains des païens ; peut-être n’auraîs-je pas le bonheur de leur échapper cette fois aussi facilement.

— Restez ici ; dans deux heures, je reviendrai avec des chevaux ; quant à une escorte, je tâcherai de vous en procurer une ; cependant, je n’ose m’y engager formellement. Puisque vous me le permettez, je vous accompagnerai jusqu’à ce que vous ayez rejoint le conde. J’espère, pendant le temps que j’aurai le bonheur de passer auprès de vous, parvenir à vous prouver que vous vous êtes trompé sur moi.

Ces paroles furent prononcées avec un accent si vrai, que l’haciendero se sentit ému.

— Quoi qu’il arrive, dit-il, je vous remercie ; vous ne m’en aurez pas moins rendu un service immense dont je vous serai éternellement reconnaissant.

Don Sylva déchira une feuille de son carnet ; écrivît quelques mots au crayon, plia la page et la remit au Tigrero.

— Êtes-vous sûr de cet homme ? lui demanda-t-il.

— Comme de moi même, répondit évasivement don Martial ; soyez certain qu’il verra le conde.

L’haciendero fit un geste de satisfaction, le Tigrero s’approcha de Cucharès.

— Tiens, lui dit-il à voix haute en lui remettant le papier, il faut que dans deux jours tu remettes ceci au chef de Guetzalli… Tu m’as entendu ?