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lequel il se cramponna, et il attendit avec un magnifique sang-froid ce qui allait arriver.

L’Ours-Noir ne tarda pas à le rejoindre. Le chef ne témoigna aucune mauvaise humeur pour le tour que le lepero lui avait joué.

— Ooah ! dit-il seulement en saisissant les branches de l’arbre, mon frère est un guerrier ; il a la finesse de l’opossum.

— À quoi cela me sert-il, répondit insoucieusement Cucharès, puisque je ne puis parvenir à sauver ma chevelure ?

— Peut-être, répondit l’Indien ; que mon frère me dise en quel lieu se trouve le Gros-Bison ?

— Je vous l’ai déjà dit, chef.

— Oui ; mon frère m’a dit que son ami était dans la grande hutte des visages pâles, mais il ne m’a pas dit dans quel endroit.

— Hum ! et si je vous désigne cet endroit, serai-je libre ?

— Oui ; si mon frère n’a pas la langue fourchue ; s’il me dit la vérité, dès que nous mettrons le pied sur la rive, il sera libre d’aller où bon lui semblera.

— Triste faveur ! murmura le lepero en secouant la tête.

— Eh bien, reprit le chef, que fait mon frère ?

— Ma foi ! répondit Cucharès, en prenant tout d’un coup son parti, j’ai fait pour don Martial tout ce qu’il m’était humainement possible de faire ; maintenant qu’il est averti, qu’il s’arrange, chacun pour soi, je dois sauver ma peau. Tenez, chef, suivez bien la direction de mon doigt ; vous voyez d’ici, sur cette pointe qui avance, ces palétuviers ?

— Je les vois.