Page:Aimard - La Fièvre d’or, 1860.djvu/81

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
74
LA FIÈVRE D’OR.

rizon ; les oiseaux s’éveillaient sous la feuillée ; le lever du soleil était proche.

Don Luis laissa tomber sa tête sur sa poitrine.

— Pourquoi lutter plus longtemps ? murmurait-il d’une voix basse et sombre ; à quoi bon aller plus loin ?

— Voilà des paroles bien désespérantes dans la bouche d’un homme aussi fort que le comte Louis de Prébois-Crancé, dit avec un ton de reproche doux et sympathique une voix basse, mais ferme à son oreille.

Le comte tressaillit comme s’il avait reçu un choc électrique, un frémissement convulsif agita tous ses membres, et, d’un bond, il fut debout, examinant d’un œil hagard, le front pâle et les traits décomposés, l’homme qui venait si à l’improviste de répondre aux paroles que lui avait arrachées la douleur.

Le chasseur n’avait pas changé de position ; son œil restait obstinément fixé sur lui, avec une expression de mélancolique pitié et de bonté paternelle.

— Oh ! murmura le comte avec épouvante en passant sa main sur son front moite de sueur, ce n’est pas lui, ce ne peut être lui ! Valentin, mon frère ! toi que je n’osais plus espérer revoir ! réponds, au nom du ciel ! est-ce toi ?

— C’est moi, frère, répondit doucement le chasseur, moi que Dieu met une seconde fois sur ta route lorsque tout semble de nouveau te manquer.

— Oh ! fit le comte avec une expression impossible à rendre, voici bien longtemps que je te cherche, bien longtemps que je t’appelle.

— Me voilà !

— Oui, reprit-il en secouant la tête avec décou-