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LA FIÈVRE D’OR.

gracieux qu’elle accompagna d’un charmant sourire.

Les étrangers se découvrirent respectueusement et s’inclinèrent profondément devant la cavalcade.

— Tiens, drôle, dit le colonel en jetant une once à l’hôtelier, qui assistait d’un air sournois au départ, voilà pour panser tes blessures.

Saccaplata ramassa vivement l’once, la serra dans sa poche et fit le signe de la croix en murmurant :

— Il t’en faudra beaucoup d’onces, à toi, pour guérir tes blessures !… Bah ! ajouta-t-il avec un rire sinistre, c’est maintenant l’affaire del Buitre ; qu’ils s’arrangent ensemble !

Lorsque don Sébastian eut quitté l’hôtellerie, il divisa sa troupe en trois corps, c’est-à-dire que deux de ses domestiques marchèrent en avant, le fusil sur la cuisse, deux autres en arrière, tandis que lui et don Cornelio, gardant doña Angela entre eux, se tinrent au milieu. Tout étant ainsi disposé, et l’ordre donné de veiller avec soin de tous les côtés, la cavalcade partit au grand trot.

Cependant, ainsi que nous l’avons dit, les deux étrangers étaient demeurés au meson.

Ils suivirent des yeux la petite troupe pendant assez longtemps, puis comme leurs chevaux avaient fini de manger, ils s’occupèrent à leur remettre le mords et à resserrer les sangles.

— Ma foi, don Luis, dit enfin le plus jeune à l’autre, tant pis, je n’y puis résister, il faut que je vous avoue ce que j’ai sur le cœur, ou sans cela j’étoufferais.

— Dites, mon ami, répondit son compagnon avec un sourire triste ; pardieu ! je sais aussi bien que vous ce qui vous préoccupe.