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LA FIÈVRE D’OR.

apparente indifférence qui donna beaucoup à penser à ses domestiques, qui connaissaient son caractère rancunier. Cependant il ne se plaignait pas, il ne faisait aucune allusion au cruel supplice qu’il avait subi ; mais au contraire, il soignait ses voyageurs avec une attention et une politesse auxquelles jamais jusqu’à ce jour néfaste il ne les avait accoutumés, ce dont ceux-ci profitaient tout en se tenant sur leurs gardes, tant cette mansuétude subite leur inspirait peu de confiance.

Cependant rien ne vint, en apparence, justifier leurs soupçons, tout se passa tranquillement ; les voyageurs s’allèrent coucher les uns après les autres, puis l’hôtelier fit sa ronde pour s’assurer que tout était en ordre, et se retira à son tour dans le corps de bâtiment affecté à son logement particulier.

Le colonel était couché depuis plusieurs heures déjà ; il dormait profondément lorsqu’il fut réveillé en sursaut par un bruit qu’il entendit à sa porte.

— Qui est là ? demanda-t-il.

— Silence ! répondit-on du dehors ; ouvrez, c’est un ami.

— Ami ou ennemi, dites-moi qui vous êtes, afin que je sache à qui j’ai affaire.

— Je suis, répondit la voix, l’homme que vous avez rencontré sur la route.

— Hum ! que me voulez-vous ? pourquoi ne dormez-vous pas à cette heure au lieu de me venir ainsi réveiller ?

— Ouvrez, au nom du ciel ! j’ai d’importantes nouvelles à vous apprendre.

Le colonel hésita un instant ; mais bientôt, réflé-