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L’ÉCLAIREUR.

Depuis longtemps déjà don Estevan était assis, le coude sur le genou, la tête dans la main, regardant sans voir, écoutant sans entendre, lorsque tout à coup il tressaillit et se redressa brusquement.

Une main s’était posée doucement sur son épaule.

Si léger qu’eût été cet attouchement, il avait suffi pour réveiller le Mexicain et le rendre au sentiment de sa situation présente.

Il regarda.

Deux hommes, deux Indiens étaient près de lui.

Ces Indiens étaient Addick et le Loup-Rouge.

Un éclair de joie brilla dans l’œil de don Estevan : ces deux hommes, il le pressentait, étaient pour lui deux alliés. Il les désirait sans espérer de les rencontrer jamais.

En effet, dans le désert, peut-on être certain de trouver ceux que l’on cherche ? Addick fixait sur lui un regard sardonique.

— Och ! dit-il, mon frère pâle dort les yeux ouverts ; sa fatigue est grande à ce qu’il paraît.

— Oui, répondit don Estevan.

Il y eut un instant de silence.

— Je n’espérais pas retrouver aussitôt mon frère et surtout dans une position aussi agréable, reprit l’Indien.

— Ah ! fit encore don Estevan.

— Oui, aidé par mon frère le Loup-Rouge et ses guerriers, je m’étais mis en marche afin de porter, s’il était possible, secours au visage pâle.

Le Mexicain le regarda d’un air soupçonneux.

— Merci, dit-il enfin avec une mordante ironie, je n’ai eu besoin du secours de personne.

— Tant mieux, cela ne m’étonne pas ; mon frère est un grand guerrier dans sa nation ; mais peut-être ce secours