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L’ÉCLAIREUR.

— Donnez-moi votre main.

— La voilà.

— Bon, soutenez-moi.

— Que voulez-vous faire ?

— Me lever.

— Vive Dieu ! je disais bien que vous étiez un homme. Allons, soit, j’y consens, essayez.

Après plusieurs minutes d’efforts infructueux, don Miguel parvint enfin à se tenir debout.

— Enfin ! s’écria-t-il d’un ton de triomphe.

Au premier pas qu’il fit, il perdit l’équilibre et roula à terre.

Balle-Franche s’élança vers lui.

— Laissez-moi, lui cria-t-il, laissez-moi, je veux me relever seul.

Il y parvint ; cette fois il prit mieux ses précautions que la première, et réussit à faire quelques pas.

Balle-Franche le regardait avec admiration.

— Oh ! il faut que la volonté dompte la matière, reprit don Miguel, les sourcils froncés et les veines gonflées ; j’y arriverai.

— Vous vous tuerez.

— Non, car il faut que je vive ; donnez-moi à boire.

Pour la seconde fois Balle-Franche, lui passa sa gourde ; le jeune homme la porta avidement à ses lèvres.

— Maintenant, s’écria-t-il avec un accent fébrile, en rendant cette gourde au chasseur, à cheval !

— Comment, à cheval ! s’écria Balle-Franche avec stupéfaction.

— Oui, je veux partir.

— Mais c’est de la folie cela !

— Laissez-moi faire, vous dis-je, je me tiendrai ; seulement, comme ma blessure au bras gauche m’empêche de me mettre seul en selle, je réclame votre aide.