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L’ÉCLAIREUR.

Cependant ils ne tardèrent pas à atteindre la gorge, qu’ils traversèrent, et bientôt ils se trouvèrent au milieu de bouquets d’arbres qui, se rapprochant doucement, commencèrent à les abriter tant bien que mal ; sur le point d’arriver à l’endroit que le premier voyageur avait désigné pour y faire halte, il s’arrêta tout à coup, et se tournant vers ses compagnons :

— Voyez donc, dit-il, ne vous semble-t-il pas voir une légère colonne de fumée s’élever du milieu des fourrés, là-bas devant nous, un peu sur la gauche à la lisière de la forêt.

Ceux-ci regardèrent.

— Effectivement, répondit le plus âgé ; il n’y a pas à s’y tromper, bien que d’ici on pourrait croire que c’est un nuage de vapeur ; cependant la façon dont monte la spirale et sa nuance bleuâtre, tout indique que c’est de la fumée.

— Depuis dix mortels jours que nous errons dans ces immenses solitudes sans rencontrer âme qui vive, ce feu doit être pour nous le bienvenu, puisqu’il nous annonce des hommes, c’est-à-dire des amis ; allons donc tout droit à leur rencontre, peut-être obtiendrons-nous d’eux de précieux renseignements sur le but de notre voyage.

— Permettez, seigneurie, répondit vivement le criado : lorsque nous avons quitté le presidio, vous avez consenti à vous laisser guider par moi, excusez-moi de vous donner un conseil qui, je le crois, dans les circonstances présentes, vous sera fet utile.

— Parle, mon brave Bermudez, j’ai la plus entière confiance dans ton expérience et dans ta fidélité, ton conseil sera bien reçu par moi.

— Merci, seigneurie, répondit celui qu’on venait de nommer Bermudez ; j’ai longtemps été votre vaquero, et