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L’ÉCLAIREUR.

bornes ; vous avez, bien que fort jeune encore, assez souffert pour qu’un rayon béni du soleil vienne égayer votre front rêveur et dissiper les nuages que la pensée et la douleur y amassent depuis si longtemps.

— Hélas ! fit-elle en baissant la tête pour cacher les larmes qui coulaient sur ses joues.

— Ma sœur, mon amie, ma Laura ! s’écria l’autre jeune fille en l’embrassant tendrement, soit courageuse jusqu’au bout ; ne resté-je pas avec toi ? Oh ! ne crains rien, ajouta-t-elle avec une charmante expression, je prendrai la moitié de tes peines, comme cela le fardeau te semblera moins lourd.

— Pauvre Luisa, murmura la jeune fille en lui rendant ses caresses, c’est à cause de moi que tu est malheureuse ; comment pourrai-je jamais reconnaître ton dévouement ?

— En m’aimant comme je t’aime, mon ange chérie, et en reprenant espoir.

— Avant un mois, je l’espère, reprit don Miguel, vos persécuteurs seront mis pour toujours dans l’impossibilité de vous nuire ; je joue avec eux une partie terrible, dont ma tête est l’enjeu ; mais peu m’importe, si je vous sauve. Laissez-moi, en vous quittant, emporter dans mon cœur l’espoir que vous n’essayerez en aucune façon de sortir du refuge que je vous ai trouvé, et que vous attendrez patiemment mon retour.

— Hélas ! caballero, vous le savez, je n’existe que par un miracle ; mes parents, mes amis, tous ceux enfin que j’aimais m’ont abandonné, excepté Luisa, ma sœur de lait, dont le dévouement pour moi ne s’est jamais démenti ; et vous que je ne connaissais pas, que je n’avais jamais vu, et qui, tout à coup, vous êtes révélé à moi dans ma tombe, comme l’ange de la justice divine ; depuis cette nuit terrible où, comme Lazare, je suis, grâce à vous, sortie du sépulcre, vous m’avez entourée des soins les plus délicats et les plus