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blement pour objet de rappeler le condamné à des idées pieuses.

Le comte ne se laissa nullement influencer par cet appareil lugubre, et il s’occupa avec la plus grande tranquillité à mettre ordre à ses affaires.

Le jour même qu’il fut mis en capilla, Valentin entra dans sa prison, suivi du père Séraphin.

De tous les prêtres dont il aurait désiré d’être assisté à ses derniers moments, le digne missionnaire était celui qu’il aurait demandé s’il avait su qu’il fût possible de le faire venir.

Mais Valentin pensait à tout. Par son ordre, Curumilla s’était mis en quête, et le brave Indien n’avait pas tardé à rencontrer le missionnaire, qui, en apprenant de quoi il s’agissait, s’était hâté de le suivre.

Cependant la condamnation du comte avait causé une émotion extraordinaire. Tandis que les civicos et les autres bandits de la ville se livraient à une joie indécente en parcourant les rues musique en tête, la haute société et la classe saine de la population manifestaient une tristesse extrême ; on ne parlait de rien moins que de s’opposer à l’exécution de la sentence, et pendant quelques heures le général Guerrero trembla que sa victime ne lui échappât.

Le vice-consul des États-Unis, indigné de ce jugement inique, mais n’ayant pas qualité pour agir officiellement, se rendit auprès de don Antonio Pavo afin de le déterminer à agir énergiquement et à sauver le comte. Don Antonio refusa, tout en protestant de la douleur qu’il éprouvait. Rien ne put le faire revenir de son refus.

Cependant, don Antonio comprit qu’il ne pouvait pas se dispenser de faire une visite au comte.