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nous insulte, nous Français, en nous engageant non-seulement à abandonner un de nos compatriotes, digne en tout point de notre appui par sa loyauté, son courage et la noblesse de son caractère, mais encore en nous proposant de lui courir sus comme à une bête fauve et de le lui livrer. Le général nous menace de nous mettre hors la loi, si nous venons en aide au comte qu’il traite de pirate et de rebelle. Qu’il le fasse, si bon lui semble : cette lettre que vous venez de me remettre sera portée par un homme sûr à Mexico, et transmise à notre ministre en même temps que l’exposé des avanies dont, depuis notre séjour ici, nous avons été nous-mêmes abreuvés par les autorités mexicaines.

— Vous avez tort, monsieur, répondit le colonel, de prendre ainsi la proposition qui vous est faite ; le général est fort bien disposé à votre égard. Je ne doute pas qu’il vous accorde de grands avantages si vous consentez à lui obéir. Que vous importe à vous autres colons paisibles ce comte rebelle que vous ne connaissez sans doute pas ? Votre propre intérêt exige que vous vous tourniez contre lui. Cet homme est un scélérat pour lequel rien n’est sacré : depuis son arrivée dans notre malheureux pays, il s’est souillé des crimes les plus odieux. Croyez-moi, monsieur, ne vous obstinez pas à vous engager dans une voie mauvaise, prouvez au gouvernement votre reconnaissance pour toutes les grâces que vous en avez reçues en abandonnant ce misérable.

Le capitaine avait écouté calme et froid la longue diatribe du Mexicain, maintenant du regard le comte et son compagnon, qui avaient une peine extrême à ne pas éclater et traiter cet homme de la fa-