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LES DRAMES DU NOUVEAU-MONDE

elle en conclut qu’il avait de graves appréhensions sur l’issue du combat.

En effet, la partie se termina en quelques coups : l’Oncle Jerry n’eut que le temps de se débattre tant bien que mal ; son flegmatique adversaire perdit volontairement deux pions, mais avec les trois qui lui restaient, en rafla cinq au Brigadier vaincu.

La Tante Sarah, stupéfaite, regarda son mari.

— Où diable as-tu pris ce coup-là, Iry ? demanda le Brigadier en tourmentant la grosse chaîne de sa lourde montre, et en se détournant pour éviter le regard de sa femme. C’est le plus beau que j’aie vu de ma vie.

— C’est mon père qui me l’a appris, sir.

— Je le crois ! oui, je le crois ! ou bien que je sois pendu ! Mais puisque tu joues si bien, comment la passion du jeu ne te tient-elle pas !

— Cela m’épouvante de jouer, sir, j’ai peur de moi. D’ailleurs cela me prendrait beaucoup de temps et interromprait mes études.

— Très-bien ! Iry ; mais je voudrais avoir le secret de ce coup-là ; veux-tu me donner revanche ?

— Avec plaisir.