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LES DRAMES DU NOUVEAU-MONDE

De longues heures s’écoulèrent ainsi dans une muette immobilité, le sommeil commença à appesantir les paupières du jeune homme : cependant il n’osait faire aucun mouvement pour secouer sa torpeur, craignant de quitter son poste au moment critique. Bientôt, pour comble de disgrâce, ayant quitté son manteau pour en couvrir les épaules de l’Oncle Jerry, il sentit un froid insupportable glacer tout son corps.

Le moindre geste leur était interdit, sous peine d’effaroucher les furtifs hôtes des bois, dont ils attendaient l’arrivée. Jamais nuit n’avait paru plus longue et plus pénible au Brigadier, pendant le cours de son aventureuse carrière ; jamais son attente et son courage n’avaient été moins récompensés : aucun être vivant n’apparut dans le silence de la nuit et quand vint le jour, rien n’apparut encore.

— Oh ! là ! là ! dit tout-à-coup le Brigadier parlant à voix basse en homme de précaution que rien ne peut prendre au dépourvu ; mon pauvre Iry ! voilà une affaire bâclée ! tous ces imbéciles de mooses ont détalé, sans esprit de retour, et si nous voulons du butin, il faudra leur courir après. Que dis-tu de ça ?