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MAURIN DES MAURES

chien accourut à fond de train et se jeta éperdument entre les jambes de Grondard, qui perdit l’équilibre juste au moment où il allait lâcher son coup de fusil.

Le géant trébucha avec des gestes désordonnés. Son fusil partit tout seul et la balle enleva, avec le chapeau de Sandri, une mèche des noirs cheveux du beau gendarme. Le charbonnier roula à terre, grotesquement étalé de tout son long, et si malheureusement, que le second gendarme se prit les jambes dans les siennes et tomba à son tour sur le derrière, tandis que Sandri étanchait la goutte de sang qui, coulant de son crâne sur ses joues, rendait ses pommettes plus roses.

Et là-bas, sous bois, tout en prenant « la lièvre » aux dents du bon chien fidèle, Maurin et Pastouré, témoins de l’aventure, en riaient à plein cœur.

— Ça me rappelle, disait Maurin à Pastouré, dont la gaieté silencieuse illuminait la large face, un bon tour que je jouai à un gendarme quand j’avais vingt ans. Figure-toi…

Les éclats de rire des deux chasseurs se perdaient dans l’écho de la vallée rocheuse, pendant que la sœur de Grondard versait un peu d’eau-de-vie sur la blessure du gendarme, en lui faisant les yeux doux.

— Je crois, grommelait Alessandri, que ce damné Maurin est un peu sorcier !

Quelques jours plus tard, il recevait l’ordre d’arrêter Maurin partout où il le rencontrerait.