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Las ! commant ne suis je semblable
Au petit escurieu qui estant arresté
Meurt de regretz sans fin & n’a si agreable
Sa vie que sa liberté.
O douce fin de triste vie
De ce cueur qui choisist sa mort pour les malheurs,
Qui pour les surmonter sacrifie sa vie
Au regret des champs & des fleurs !
Ainsi aprés mille batailles,
Vengeans leur liberté on a veu les Romains
Planter leurs chauds poignards en leurs vives entrailles,
Se guerir pour estre inhumains.
Mais tant s’en fault que je ruine
Ma vie & ma prison qu’elle me plaist si fort,
Qu’en riant je gazouille, ainsi que fait le cigne,
Les douces chansons de ma mort.


VIII.

Le miel sucré de vostre grace,
Le bel astre de vostre face
Meurtriere de tant de cueurs
Ne sorte de ma souvenance ;
Mais où prendray je l’esperance
De guerison pour mes douleurs ?
Je sens bien mon ame insensee
Se transir sur vostre pancee
Et sur le souvenir de vous,
Mais je ne puis trouver les charmes
Qui me font friand de mes larmes
Et trouver mon malheur si doux.
Deux yeux portent ilz telle amorce ?
O Dieux ! il y a tant de force