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LE PRIMTEMS DU SIEUR D’AUBIGNÉ.
Comment tu fis ton marroquin
Paroistre de loin chevrotin.
Qu’en trois cens sortes de mesnage
Tu revendis ton pucelage,
Que tu seuz à trois cens gascons
Le vendre de trois cens façons.
Et depuis croissant ton courage
Et ta chaleur ainsi que l’aage,
Tu estallois ton marroquin,
Tirant du noble & du coquin
Le plaisir & la recompence.
Je n’oubliois pas ta prudence
Qui est de vendre ta beauté
Autant que tu as achaté
Le blanc chez un apoticaire,
Et prenant autant pour le faire,
Mais puis aprez, avecq’ le temps
Diminua ce passe temps.
Tu enrageais alors que l’aage
T’afoiblist le cors, non la rage,
Les attraitz, & non la chaleur,
T’osta les amans, non le cueur.
Au lieu de louer ton bagage.
Te força de prendre à louage,
Et te fit en mordant tes doits
Acheter ce que tu vendois.
Je n’oublioys que qui se joue
A toy & se frotte à ta jouë,
Il se leve blanc & beau filz,
Et je contois comme tu fis
Un autre chauve de la teste
Emporter du poil de la beste
En luy donnant de tes cheveux.
Et à un vieillard chaleureux