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152 LE PRIMTEMS DU SIEUR D'AUBIGNE.

Doncq’ faire mourir le cueur

Et faire l'ame endurer,
C’est aider le malfaiteur
Et l'innocent martirer.
XV.

Tes yeux vaincueurs & languissans,

Tes ris de perles florissans,
Ta joue & ta bouche de rozes
Me bruslent ainsi peu à peu
Que sans les pleurs dont tu m'arroses,
Je fusse en bluette de feu.

Je suis noie de tant de pleurs

Que si tes yeux doux & vaincueurs,
Si ta joue et ta bouche encore
N’eussent espris de leurs flambeaux
En moy le feu qui me devore,
Je serois fondu en ruisseaux.

Ainsi tels remèdes cruels

Font mes feux, mes pleurs immortels
Las ! de quelle sorte d’offence
Ay je peché pour tant souffrir ?
Que ce soit peu de penitence
Pour me faire une fois mourir.
XVI.

Vous dites que je suis muable,

Que je ne sers pas constemment,
Comment pourrois je sur le sable
Faire un asseuré fondement ?