Page:Agrippa d'Aubigné - Œuvres complètes tome troisième, 1874.pdf/118

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Et qui force tes sens de chercher un remede
Où il n’y en a pas.

Ces larmes & ces cris ne la font point revivre
Estant morte icy bas,
Ny par eux tu ne puis rendre ton cœur delivre
De si cruels debats.

Tu les nommes cruels, renouvelant la playe
Sans la pouvoir guerir,
Te laissant à tousjours le seul plaisir pour paye
De desirer perir ;

Et perir tu ne puis, car ta peine plus forte
Est changee en plaisir :
Ton plaisir est pleurer & ton ame mi-morte
N’a que ce seul desir.

Tu dis que nul ne pense amoindrissant l’offence
Amoindrir mon malheur,
Car finissant tes cris, de plaindre son absence
Je n’aurois le bonheur :

Plainte qui chasque fois à tes yeux la renvoye
Esblouis de leur deuil,
Plainte qui te fait voyr ton aimee & ta joye
Enfermee au cerceuil.

Mais son ame est au ciel qui n’estant point humaine
Triumphe pour tousjours,
Triumphante au bonheur d’une vie certaine
D’avoyr parfaict son cours.

Donq’ que ton corps descende en la mort ténébreuse
Pour y voyr sa moitié,