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Qui meslé de nos sons, de nos chansons amuse
L’oreille des Dieux.

Ta perte, ta pitié pour quelque temps excuse
Ta douleur & tes pleurs,
Mais craignons que quelcun se vengeant ne t’accuse
De feindre ces douleurs.

Ils diront : Et à quoy servent ces vaines plaintes
Qu’enfin il faut finir ?
Belle, cessant tes pleurs, de ces cendres esteintes
Esteins le souvenir.

Ainsi rends de tes yeux la clarté desiree,
Descouvre tes beaux feux,
Et de ce doux serain la faveur esperee
Fais sentir à nos yeux,

Heureux de voyr encor aprés un long orage
Ce soleil desiré,
Plus heureux de trouver aprez un long naufrage
Un rivage asseuré !

Tu te plains, mais ce cœur que ta passion meine
Ne reçoit changement :
Changeons donc cett’ humeur qui pour sembler humaine
Pleure inhumainement.

Car c’est pleurer ainsi, puisque l’amour extreme
Que tu sens de plus fort
Te faict plaindre le bien d’une joye supreme
Acquise par sa mort :

Ou tu es trop humain, amour qui veux qu’on cede
A ce qu’on ne doibt pas,