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Si cela n’était aussi absurde, combien ce serait lamentable ! Comment donc la raison populaire s’est-elle si vite pervertie, et de telle sorte, qu’elle soit allée chercher hors de France, pour la représenter, ce vain simulacre de choses mortes ; qu’elle honore, en la personne d’un être sans valeur et sans prestige, ce qu’il y a de plus inconciliable avec la liberté et l’égalité : le principe du commandement héréditaire ? La fantaisie du 15 mai, plus dangereuse peut-être, était bien plus logique ; c’était la fièvre de la démocratie surexcitée ; c’était l’abus de sa force, ce n’était pas l’oubli de son principe ; tandis qu’aujourd’hui, ne craignons pas de le confesser pour rendre jamais impossible le retour à des aberrations analogues, la révolution de février se couvre d’un ridicule amer en se laissant surprendre par les artifices grossiers d’un prétendant subalterne. Combien lui-même doit s’étonner d’avoir trouvé, sous la République, des esprits plus crédules et des consciences plus accessibles qu’au temps de la dynastie, où le premier soldat qu’il rencontre lui répond qu’il ne le connaît pas ;la population au milieu de laquelle il se présente se lève en masse pour repousser une agression insensée[1].

Est-ce bien chez un peuple éclairé que l’on peut réussir avec des moyens aussi puérils et d’aussi vulgaires séductions ? Marchander, avec l’argent de l’Angleterre, l’honneur de nos soldats, promettre au paysan la suppression de l’impôt, distribuer de l’eau-de-vie dans les carrefours, répandre à profusion des emblèmes et des panégyriques[2], singer Tar-

  1. Voir le Moniteur du 28 septembre 1840 et des jours suivans.
  2. Voici un passage d’une de ces biographies : « … Il est vrai que n’ayant ni l’ovale de figure, ni les joues pleines, ni le teint bilieux de son oncle, l’ensemble de sa figure est privé de