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HISTOIRE

parte, dit-il, tentait une misérable parodie du manteau impérial qui ne va plus à sa taille, il serait à l’instant mis hors la loi et traîné sur la claie. »

M. Buchez rapporteur du dixième bureau combat M. Jules Favre. Le bureau s’est prononcé à l’unanimité contre l’admission. Ce n’est pas le citoyen Bonaparte qui se présente, dit le rapporteur, c’est le prince Louis-Napoléon, c’est un prétendant qui est venu deux fois sur le sol français pour réclamer à main armée son droit héréditaire à l’Empire. Aujourd’hui même, c’est par le cri de : Vive l’Empereur ! que ses partisans saluent son élection. M. Buchez fait remarquer, à l’appui de ses soupçons, que le prince Louis-Bonaparte n’a pas reconnu la République ; qu’il n’est pas venu un mot de lui, pour mettre fin aux agitations de la rue, à l’ambiguïté de sa situation, à la perplexité de ceux de ses partisans qui le croient sincère.

À ces mots, M. Vieillard quitte son banc avec précipitation et monte à la tribune. Il vient, dit-il, accomplir un devoir sacré en défendant un absent, un ami. « Il y a trente ans, continue M. Vieillard, que je connais le citoyen Louis Bonaparte. Après en avoir fait un député malgré lui, on veut en faire un prétendant malgré lui. Son élection n’a pas été, comme on l’a dit, une conspiration, mais une protestation spontanée de la population contre les souvenirs funestes de 1815. » Et, pour mieux confirmer ses assertions, M. Vieillard donne connaissance à l’Assemblée d’une lettre de Louis Bonaparte, datée de Londres, 11 mai 1848, ainsi conçue : « Je n’ai pas voulu me présenter comme candidat aux élections, écrivait le prince à son confident, parce que je suis convaincu que ma position à l’Assemblée eût été extrêmement embarrassante. Mes antécédents ont fait de moi, bon gré, mal gré, non un chef de parti, mais un homme sur lequel s’attachent les regards de tous les mécontents. Tant que la société française ne sera pas rassise, tant que la constitution ne sera pas fixée, je sens que ma position en France serait très-difficile, et même très-