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HISTOIRE

Personne, excepté peut-être MM. Delécluze et Caussidière, ne fut surpris d’un pareil résultat. Il avait fallu foute leur ignorance de la politique extérieure pour s’être persuadé que la Belgique souhaitait, à ce moment-là, le renversement de son gouvernement. Les dernières élections, en donnant la majorité au parti libéral, faisaient espérer de larges réformes électorales et municipales qui ranimaient le sentiment patriotique. Le clergé, aisément réconcilié par une reine très-catholique avec un roi peu zélé protestant, aidait de son ascendant le rapprochement des partis constitutionnels. De nombreuses défections dans le parti radical avaient achevé de donner au libéralisme une prépondérance décisive. La Flandre, qui avait longtemps incliné vers la France, souhaitait aussi, dans l’intérêt de son commerce, l’union douanière avec la Hollande, où le roi abolissait les vieilles institutions restrictives de la liberté. Dans de telles conjonctures, l’expédition de Risquons-Tout n’eut d’autre effet que de resserrer le lien national, en achevant de discréditer, et pour longtemps peut-être, l’influence française.

Une expédition analogue en Savoie, expédition à laquelle M. Ledru-Rollin n’eut aucune part et que le commissaire de Lyon s’efforça d’empêcher, eut un résultat pareil[1]. La colonne insurrectionnelle, forte de 2,000 hommes, s’empara par surprise de la maison de ville à Chambéry ; mais, au bruit du tocsin, les paysans accoururent au secours de la garde nationale, et, après un combat très-court, ils reprirent la ville.

L’expédition des corps-francs allemands, entrés dans le grand-duché de Bade ne fut ni mieux concertée ni plus

  1. Les ministres et le public sont maintenant bien convaincus, écrit l’ambassadeur de Sardaigne au ministre des affaires étrangères, que le gouvernement de la République française n’a pas excité ce mouvement, et que s’il avait voulu intervenir, même indirectement, la lutte aurait été bien autrement sérieuse » (Voir le discours de M. de Lamartine à l’Assemblée constituante, séance du 25 mai 1848.)