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HISTOIRE

impulsion décisive ; Kossuth se sentait appuyé à ce point qu’il pouvait tenter de résister ouvertement aux ordres de l’Autriche. Quatre années dans la forteresse de Bude châtièrent sa hardiesse ; une popularité immense la couronna. L’attention publique se concentra sur sa personne ; il préoccupa toutes les imaginations, gagna toutes les sympathies, et, quand les portes de la prison s’ouvrirent devant Kossuth, le pays tout entier crut avoir retrouvé la liberté.

Pendant les quatre années qu’il vécut enfermé à Bude, il s’appliqua à l’étude de la révolution d’Angleterre et de la Révolution française, particulièrement dans la conduite des assemblées. À peine hors de prison, en 1841, il prit la direction d’un journal démocratique (Pesti Hirlap) fondé à Pesth par le baron Wesselényi. Le succès de ce journal, le premier où les affaires publiques eussent été traitées avec talent et liberté, passa toute espérance. L’adhésion du comte Louis Batthiànyi, chef de l’opposition dans la chambre des magnats, fut la marque la plus significative de ce succès. L’union du grand seigneur, resté jusque-là dans la mesure politique du parti tory, avec l’agitateur démocratique acheva de constituer le parti national.

En 1847, le comte Batthiànyi proposa la candidature de Kossuth aux électeurs du comitat de Pesth qui le nommèrent. Dès son entrée à la diète de Presbourg, et malgré les attaques du parti conservateur à la tête duquel était le comte Szècsenyi, Kossuth se vit implicitement reconnu comme chef de l’opposition. Les hommes les plus considérables dans les deux chambres, Wesselényi, Ladislas Teleki, Majlath, Dèak, Szemere, Eötvös, recherchaient son amitié et rendaient à l’envi hommage à un talent dont aucun autre ne pouvait déjà plus balancer l’influence. Chacun des discours de Kossuth devint un événement politique. Chacun de ses succès de tribune relevait l’orgueil national et grandissait dans les cœurs l’image de la patrie.

Lorsque arriva, à la diète, la nouvelle de la révolution de Février, ce fut Kossuth qui, dans un discours où il se sur-