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personnes), je prends l’engagement de répondre à tout et de dissiper tous les doutes.

Je n’ai eu recours à la publicité, et je n’ai dirigé contre les fonctionnaires inférieurs, par un pourvoi au conseil d’État, et contre M. le général Donzelot, par une plainte déposée à la Chambre des pairs, que comme un moyen d’éclairer la religion du Roi et l’opinion publique, et pour suppléer à mon impuissance.

Mais puisque l’espoir d’une justice complète m’est donnée, je vais suspendre toutes ces actions.

Il ne s’agit pas ici, Monseigneur, d’hostilité ; depuis six semaines je me suis opposé à toute publicité, et j’aurais continué d’exercer en paix mon ministère, comptant sur les assurances verbales qui m’avaient été données, si le devoir le plus impérieux et la crainte d’un grand malheur ne m’avaient obligé de laisser un libre cours aux démarches que les nombreux amis de mes cliens ont tentées.

Il s’agit de justice ; je suis le premier à désirer qu’elle se fasse sans bruit, pourvu qu’elle soit entière.

Je supplie V. E. d’achever son ouvrage, et de me faire connaître les ordres qu’elle a donnés pour suspendre le départ du Chameau, et de me faire communiquer toutes les pièces de la procédure.

J’ai l’honneur d’être, etc.

Isambert.

N° XI. Lettre d’un colon blanc de la Guadeloupe au défenseur des déportés[1].

Paris, 8 juillet 1824.

Monsieur, je viens de lire le Mémoire que vous avez publié pour les malheureux déportés de la Martinique : il me serait difficile de vous exprimer ce qu’il m’a fait éprouver. Je savais que les abus les plus affreux existaient dans ma patrie ; mais je ne croyais pas qu’il y eût si peu d’humanité. Quand on est si cruel, on a tout à craindre ; et le premier des devoirs pour les opprimés est de songer à la vengeance… En traçant ces derniers mots, Monsieur, je sens se briser mon cœur : j’ai aux colonies un père sexagénaire, des parens et un grand nombre d’amis ; jugez quelles doivent être mes inquiétudes. Ah ! puisse le sage qui nous gouverne détourner les malheurs qui menacent les colons ! Puisse-t-il abolir cette odieuse distinction qui existe entre les deux premières classes de mes compatriotes,

  1. Les sentimens exprimés dans cette lettre sont trop honorables pour que nous ne nous empressions pas de les publier ; c’est un moyen de rectifier ce qu’il pourrait y avoir de trop absolu dans notre Mémoire.