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jusqu’au bout le mandat que j’ai reçu, et dont j’ai l’honneur de vous adresser copie, et pour dégager ma responsabilité vis-à-vis de tant de familles malheureuses, et j’ajoute sans reproches, que de publier la série de mes démarches auprès de V. Exc., et de mes efforts infructueux. Jamais dans ma vie je n’ai défendu de cause plus juste, plus favorable, plus digne de la bienveillance et de l’attention du gouvernement. Je déplorerais éternellement le résultat de l’erreur dans laquelle V. Exc. aurait pu être entraînée. Je la supplie, au nom de la justice, de l’humanité, de la sainte religion qui parle si haut au noble cœur de V. Exc., d’accorder le sursis que je réclame. Je la conjure, dans l’intérêt de sa propre gloire, de ne pas prendre la responsabilité d’une déportation que rien ne saurait justifier, et dont elle aurait tout l’odieux, puisque l’ordre de M. le général Donzelot n’était que provisoire. Il y aurait d’ailleurs, dans la mesure prise à l’égard des 37, cette circonstance qu’ils seraient plus mal traités que MM. Eriché, Millet, Laborde, et Montlouis Thébia, qui attendent paisiblement à Brest qu’il soit statué sur leur sort. Il ne faut pas qu’on croie que c’est parce qu’ils sont riches qu’on leur accorde le privilége de la justice. Eux-mêmes, j’en suis persuadé, ne veulent pas séparer leur cause de celle de leurs compagnons d’infortune, innocens comme eux, et plus malheureux, puisqu’ils sont, par l’effet d’une mesure que je ne saurais qualifier, privés de tous moyens d’existence.

J’ai l’honneur de prier V. Exc. de m’accuser réception de la présente pour ma décharge, et d’agréer l’expression de mon profond respect.

Signé Isambert.

N° V. Lettre à S. Exc. le président du conseil des ministres.


Paris, 30 juin 1824 (Courrier français, Constitutionnel
et Journal des Débats du 3 juillet.)

Monseigneur, le 19 mai dernier, j’ai eu l’honneur d’adresser à V. Exc., pour en saisir le conseil des ministres, une requête au nom des déportés de la Martinique, retenus à bord de la corvette le Tarn, en rade de Brest, signée de tous ceux d’entre eux qui savaient écrire.

Le même jour, je suppliais V. Exc. de mettre cette supplique sous les yeux du Roi, et de provoquer en conseil des ministres un ordre de sursis, jusqu’à ce que S. M. fût à portée de prononcer définitivement sur le mémoire justificatif dont j’annonçais l’envoi, pour démontrer l’illégalité de la déportation, et sur les pièces que j’attendais, et qui ne me sont parvenues que vers le 15 juin. Le 28 de ce mois, j’ai adressé à S. Exc. le