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quelle est l’injustice même, lorsqu’il s’agit d’intérêt de caste ; lors, par exemple, qu’un homme de couleur réclame contre un créole le paiement de quelque créance, ou lorsqu’il se plaint d’avoir été maltraité. On en cite à cet égard des exemples qui passent toute croyance.

    somme à sa disposition, trouva de suite un blanc pour la lui fournir.

    17 juillet 1679. Arrêt du conseil supérieur qui après avoir condamné des nègres à avoir la jambe coupée et des négresses à avoir le nez coupé, avec une fleur de lys sur le front, pour avoir cherché à s’échapper, déclare avoir usé d’indulgence, et annonce qu’il prononcera à l’avenir le dernier supplice. Cette terrible promesse s’exécute, et comme les peines sont encore arbitraires dans les colonies, c’est-à-dire soumises à la discrétion des juges, nous avons vu au XIXe siècle deux arrêts du conseil de la Martinique, du 1er  décembre 1815, qui condamnent à la peine capitale le jeune Élysée et ses compagnons, pour avoir, en cherchant à sortir de la colonie sur une barque, commis le crime d’avoir voulu dérober le prix de leurs personnes à leur maître ; d’autres à avoir les jarrets coupés, et la mère d’Élysée à assister à l’exécution de son fils, et à garder prison perpétuelle, pour avoir, pendant quatre mois, dérobé son enfant aux recherches de la justice !

    14 novembre 1712. Arrêt du conseil supérieur qui interdit plusieurs médecins de leurs fonctions, à cause de leur incapacité, et leur permet seulement de se livrer au traitement des nègres.

    Pour donner une idée de la justice du conseil en certains cas, nous citerons l’arrêt qu’a rendu, le 22 septembre 1721, celui de Saint-Domingue.

    « Lefebvre, capitaine des milices, est entré, et a présenté sa dénonciation contre vingt-un nègres, dont cinq armés et le reste chargés de bagage, accusés de désertion chez l’Espagnol ; sur quoi le conseil, vu le réquisitoire de M. le comte d’Arquian, la plainte ayant été communiquée auxdits nègres présens, et fait interpellation judiciaire de reconnaître la vérité en présence de Lefebvre, qui leur a soutenu le tout véritable, à quoi ils ont répondu que quoiqu’ils eussent des armes, ils avaient dessein de revenir, le tout vu et mûrement considéré, et ouï le procureur-général ; le conseil, sans aucune formalité, pour cette fois et sans tirer à conséquence ; attendu la nature du fait, a déclaré les deux nègres, Alexandre et César, atteints et convaincus de désertion, soulèvement et rébellion les armes à la main (la désertion seule était vraisemblable), et Bazat,