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N° XXII. Lettre de M. Isambert, au même.

Paris, 28 juillet 1824.

Comme je ne mets ni passion ni malveillance envers les fonctionnaires, dans la défense qui m’est confiée, je me contenterais de la réponse contenue dans votre lettre du vingt-trois juillet, qui vient de me parvenir, et dont j’ai l’honneur de vous accuser réception ; mais vous n’avez pas encore rempli toutes les formalités prescrites par le Code pénal, ou du moins, car je suppose que vous l’avez fait, vous n’en avez pas justifié aux parties intéressées.

Je demande donc que vous ayez la bonté de nous faire passer copie, 1o  des actes que vous avez faits, pour constater la détention des trente-sept, et celle de MM. Regis et Saint-Cyr-Latour. — 2o  Des dénonciations que vous en avez faites au procureur général à Poitiers. Dans ce cas, je m’adresserai aux magistrats supérieurs ; et je me plairai à rendre hommage à votre zèle pour la justice.

Si vous pensez que les mesures prises à l’égard de mes cliens sont légales, c’est qu’apparemment vous connaissez les décisions prises et les jugemens prononcés à leur égard. Dans ce cas, je vous prie de m’en adresser copie certifiée de vous ; jusque-là je serai fondé à dire qu’il y a détention arbitraire et illégale ; probablement je suis aussi bien informé que vous, sur la nature de ces mesures ; je puis vous assurer, non d’après ma seule opinion, mais d’après celle des barreaux de Paris, de Bourges, d’Amiens, etc., sans compter ceux dont j’attends l’opinion, que les décisions dont il s’agit, ne sont rien moins que des jugemens. Si ce sont des mesures de haute police et de haute administration, elles doivent cesser leur effet en France, et aucune autorité française n’a le droit de les tenir en charte privée ; les autorités de Brest l’ont senti, elles ont écrit à S. E. le ministre de l’Intérieur, pour que leur responsabilité soit mise à couvert, et elles ont eu raison ; car l’art. 119 a été fait contre les administrateurs.

Pour être certain que ces mesures sont suffisantes et légales, vous avez dû en garder copie ; si vous ne l’avez pas fait, vous pouvez la réclamer des administrateurs de la marine, à Rochefort, et m’en adresser copie.

Par-là, monsieur le procureur du Roi, mais par-là seulement, vous aurez rempli, autant qu’il était en vous, le vœu de l’art. 119 du Code pénal, et vous m’aurez mis à portée de démontrer la nullité de décisions que je ne connais pas ; c’est le but auquel je dois tendre de toutes mes forces. Le devoir qui m’est imposé, est trop sacré, pour que vous vous of-