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VULGATE LATINE ET S. JÉRÔME

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qui n’aime pas le Christ. Mnis qui méprise, avec S. Paul, la poiupe mondaine, répète avec lui : Qui me séparera de la charité de Jésus-Christ ? Lui s’est tant dévoue cl nous a prodigué tant de preuves de son amour par dos sacriliees continus, que la seule réponse digne est de donner sang pour sang ; et, rachetés par le sang du Christ, de mourir volontiers pour lui. » Epist., xiii, n. 3j- 4 1 P.£., XXII, $a3-4a5. Ce qui devait arriver eut lieu. A peine le pape Damase l’util mort (i i déc. 384), que l’orage éclata, formidable ; il emporta le moine censeur des abus, et notamment île L’ignorance des clercs. Abandonné de tous ceux qui auraient pu le défendre efficacement, sentant qu’il n’avait pas à compter sur la faveur du nouveau pape, Sirice (384-389), Jérôme résolut de repartir pour L’Orient, où il aurait plus de loisirs et de ressources pour les travaux sur la Bible qu’il méditait. Il s’embarqua à Ostie, en compagnie de non plus jeune frère, Puulinien, du prêtre Vincent et de quelques autres amis (août 385). Avant de s’embarquer, il écrivit à sa noble bienfaitrice, Asella, une lettre restée célèbre (la xlv c, P. L., XXII, 480), dans laquelle il prenait congé de ses amis, et aussi… de ses adversaires.

Les voyageurs furent rejoints à Chypre, chezl’évêque de Salamine, Epiphane, par Paula et sa ûlle Eustochium, avec quelques moniales romaines, que le dégoût des intrigues et l’amour de la solitude éloignaient pour toujours de « Babylone », pour aller vivre et mourir à « Jérusalem ». Arrivés à Antioche,

« les pèlerins du Christ » furent accueillis cordialement

par l’évêque Paulin, qui présida lui-même à l’organisation de leur caravane. Ils entreprenaient un voyage de six mois à travers les pays où la vie terrestre du Christ s’était développée : de la Syrie à l’Egypte. En passant, ils visiteront les laures de Palestine et les monastères de Nitrie. En de telles pérégrinations, la pitié et l’étude trouvaient pareillement leur compte. Plus lard, dans ses lettres, ses préfaces et ses commentaires, Jérôme reviendra volontiers sur l’utilité des voyages pour l’historien, le littérateur et l’exégèie, désireux de comprendre les Livres saints. Les pèlerins avaient eu soin de se mettre sous la conduite « des plus instruits d’entre les Juifs <. Præf. in Paralip. iuxta lxx, ad Domn. et Rogat., P.l… XXIX, 401 ; cf. Epist., xlvi, ad Marcellain, P. L., XXII, 483. En traversant Alexandrie d’Egypte, Jérôme prend un mois environ pour suivre les leçons publiques de Didyme l’Aveugle, qui restera toujours « son voyant ». Comm. in Gal., Prcl. ; P.l.., XXVl, 30çj.

De retour en Palestine, les pèlerins se font solitaires. Ils se fixent à Bethléem, tout proche de la grotte de la Nativité, dans deux monastères séparés, l’un pour les hommes, l’autre pour les femmes, ayant respectivement à leur lête Jérôme et Paula. C’est là que vont s’écouler les trente-quatre ans qui restent encore à l’auteur de la Vulgate, pour méditer et accomplir son œuvre.

d) L’ouvrier avisé commence par se préparer de bons outils. Dès cette époque, le moine studieux est tel que Postumien, l’ami de Sulpice Sévère (Dial., i, 4), le décrira quinze ans plus tard : « Toujours un livre à la main, il ne se repose ni jour ni nuit ; ou il Lit, ou il écrit ».

Cette période de préparation devait durer cinq ans. Jérôme reprend les travaux d’approche, commencés en Syrie et à Constantinople, mais interrompus par d’autres préoccupations. Pour dérouiller sa plume, il continue la traduction d’Origène, c’est-à-dire les trente-neuf homélies sur S. Luc. (P. L., XXVI, 21930fi). Cédant aux instances, toujours décisives, de Paula et d’Eustochium, il met la dernière main à

son explication de 1 Eeclésiaste, diele un court commentaire de quatre épîtres de S. Paul (Philent., Gui., Ephes., TU.). Une œuvre beaucoup plus importante, vrai prélude de la traduction de la Bible hébraïque, fut la revision de tout l’Ancien Testament latin d’après les Septante, mais en usant du droit de regard sur le texte hébreu. Comm. in epist, ad Til., m, y ; /’. L., XXVI,.">(|5 ; Præf. in. Ubr. Paralip., uxta î.xx ; P. /.., XXIX, 4 « ; Apol. Ile. Ruf. P. L., XXUI, 448 ; cf. Alg., Epist., Lxxi, a ; P. /.., XXXIII,

L’intérêt particulier de cette revision tient à ce qu’elle n’a pas été conduite d’après l’édition commune (/ ; xou » i svô’^i ;) de la version alexandrine, mais d’après la recension d’Origène, celle qui dans les Hexaples occupe la 5e colonne et qu’on appelle pour cette raison l’édition hexaplaire. B. /.., XXIII, 454 ! cf. XXII, 671, 838. Il ne semble pas que ce travail ait jamais circulé en son entier. S. Jérôme se plaint qu’on lui ait dérobé la première partie de son œuvre. Epist., cxxxiv, /’. A.., XXII, 1162. Il est vrai que le post-scriptum de cette lettre, dans lequel se lit le renseignement-, est d’une authenticité douteuse. Quoi qu’il en soit, il ne nous reste de cette revision que le livre de Job et le Psautier. P. t., XXIX, 59-398.

C’est la seconde fois que Jérôme revise les Psaumes d’après le grec. S’il entreprend à nouveau ce travail, c’est qu’il ne se reconnaît plus lui-même dans la revision faite à Rome en 384 (voir plus haut col. 1948), tant lescopisles l’ont altérée, en y réintégrant des leçons qu’il en avait éliminées. Cette nouvelle recension, faite à Bethléem en 38 ; , a reçu le nom de Psautier gallican, à cause de l’usage que l’on en ût, de bonne heure, dans les Gaules. Lors de la réforme liturgique qui eut lieu sous le pontificat de S. Pie V (1 568), le « psautier gallican » fut substitué au a psautier romain » dans le missel et le bréviaire, excepté pourtant le ps. xciv, Venite, exultemus Domino, à l’invitatoire des Matines. On fit encore une exception pour le chapitre de la basilique de S. Pierre de Rome, et pour l’Eglise de Milan, qui furent autorisés à conserver le « psautier romain ». En 15fjo, on introduisit pareillement le « psautier gallican » dans l’édition romaine officielle de la Vulgate latine. Cf. A. Wilmart, Revue Biblique, 1922, p. 350, et P. Capkllb, Hev f Bénédictine, 1925, p. 36

Pendant cette période d’activité silencieuse, l’effort de Jérôme se porta principalement sur l’étude de l’hébreu, qu’il avait conscience de ne savoir encore que très imparfaitement. Il se met à l’école des

« plus habiles d’entre les Juifs  de Palestine. A

Bethléem, il prend pour maître un certain Baranina, c nouveau Nicodème, venant le trouver de nuit, propler metum Iudæorum ; » et ici Jérôme oublie que ce dernier trait convient à Joseph d’Arimathie (Jean, xix, 38). Epist., i.xxxiv, u. li, ad Pammach. et Océan.,. PL., XXII, j45 ; Præf. in lob, P. T.., XXVI, 399 ; RnGn(Àpol., l, 1 3 ; P. I.., XXIII, 407) a eu, le mauvais goût de jouer sur son nom, en l’appelant Barabbas. Il semble que Jérôme a gardé longtemps Baranina comme collaborateur. C’est de lui qu’il écrit : « Hcbræus meus, cuius sæpe facio mentionem. .. » P. /.., XXIII, io38, io48, io. r)3 ; cf. XXII, / ( 5 ; XXVIII, 1293. Il parleencore d’un Juif deTibériade, P.L., XXIX, 4 ( ><, et d’un autre de Lydda, u dont il a payé les leçons de beaux deniers ». Præf. in Job, P. /.., XXV1I1, 1081. Faut-il pensera un quatrième et même à un cinquième personnage, quand, dans les préfaces de Daniel, d’Esdras et de Tobie, il dit « qu’un Hébreu lui appris assez de chaldéen pour traduire intégralement ces textes » ? P. L., XXVIII, 1292 ; XXIX, a6 ; XXIX, 140’,.

S. Jérôme est si sûr de s’être rendu maître de la