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TRINITÉ (LA SAINTE)

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enfin, est son Fils unique : c’est l’enseignement qui sera repris dans le prologue de l’épître aux Hébreux. Un peu plus tard, c’est la question sur le Messie fils de David : « David lui-même l’appelle Seigneur ; comment donc est-il son fils ? » (Marc, xii, 35-37) ; c’est la description prophétique du jugement universel,

« quand le Fils de l’homme viendra dans sa

gloire avec tous les anges », et décidera du sort de tous les hommes (Matth., xxv, 31-46). C’est eDfin le témoignage suprême que Jésus se rend à lui-même devant le grand-prêtre :

Le grand-prétre, se lavant, lui dit : Tu ne réponds rien ? qu’est-ce que ces gens témoignent contre toi ? Mais Jésu< se taisait. Le grand-prètre lui dit : Je t’adjure, au nom du Dieu vivant, de nous dire si tu es le Christ, le Fils de Dieu. Jésus lui dit : Tu l’as dit. En outre, je vous le dis, vous verrez désormais le Fils de l’homme assis a la droite de la Puissance et venant sur les nuées du ciel. Alors le grand-piêtre déchira ses vêtements en disant : Il a hlasphémé ! Qu’avons-nous encore besoin de témoins ? Vous venez d’entendre le blasphème. Que vous en semble ? Et ils répondirent : Il est digne de mort (Mail., xxiii, 62-66).

Tout cet ensemble de textes est décisif, il nous force à reconnaître en Jésus non pas seulement un prophète, un Messie, mais le Fils du Dieu vivant. Pour mieux entendre cette filiation, il faut considérer surtout certaines paroles du Seigneur, où se révèle la relation unique qui le rattache à son Père.

Entre les hommes et le Père céleste, Jésus est le médiateur indispensable, le seul qui connaisse le Père, le seul qui puisse le révéler ; et ce qu’il y a de plus remarquable encore, c’est que les relations qui unissent le Père et le Fils sont décrites sous l’aspect d’une réciprocité parfaite, impliquant une communauté de nature ;

Je te loue, Père, Seigneur du ciel et de la terre, de ce que tu as caché ces choses aux sages et aux intelligente, et de ce que tu les as révélées aux enfants : Oui, Père (je te loue) de ce que telle a été ta volonté. Tout m’a été confié

Par mon Père, et personne ne connaît le Fils, si ce n’est le ère ; personne non plus ne connaît le Père, si ce n’est le Fils, et celui à qui le Fils veut le révéler (Matth., xi, 25-27 ; Luc, x, 21-22). Sur ce texte, cf. Origines, p. 307 sqq., et note D, p. 391-598.

De ce texte on rapprochera beaucoup d’autres paroles du Seigneur, recueillies soit parles synoptiques, soit par saint Jean. Jésus y apparaît comme l’unique médiateur entre son Père et les hommes, vivant par le Père et communiquant la vie aux hommes (Jean, vi, 57) ; « de même que toi, Père, es en moi et moi en toi, qu’ainsi eux soient un en nous » (ibid., xvi, ai).

Et cette médiation n’apparaît jamais comme le ministère d’un agent subordonné, à mi-hauteur entre Dieu et les hommes, ainsi que Philon concevait le rôle et la nature du Logos ; c’est l’action de celui qui, étant vraiment Dieu et vraiment homme, unit en sa personne les deux natures et répand sur l’humanité les richesses infinies qu’il tient de son Père et qu’il reçoit en plénitude.

De là le double aspect sous lequel nous apparaît dans l’Evangile la personne du Christ : vis-à-vis du Père, une attitude de dépendance, d’adoration, de prière, de soumission totale à sa volonté : autant qu’il le peut, il s’efface pour orienter vers le Père le dévouement, l’amour, la prière de ses disciples :

« Pourquoi m’appelles-tu bon ? Nul n’est bon, si ce

n’est Dieu seul » (Marc, x, 17-19) : « … quant à être assis à ma droite et à ma gauche, ce n’est pas à moi de vous le donner ; ces places appartiennent à ceux à qui mon Père les a réservées » (Matth., xx, 22-23) ; c ce jour (du jugement), nul ne le sait, ni les anges

du ciel, ni le Fils, si ce n’est le Père » (Marc. xni. 3a) : de même qu’il réserve au Père la disposition des places du royaume, ainsi il lui réserve ta communication des secrets divins (Cf. Origines, p. 310-312 et note C). Ce sont ces sentiments que révèle encore cette parole dedésir et d’humilité que Jésus, impatient d’aller à son Père, adressait à ses disciples : « Si vous m’aimiez, vous vous réjouiriez de ce que je vais vers mon Père, parce que mon Père est plus grand que moi » (Jean, tc.iv, 28).

Et d’autre part, le Fils possède tout ce qu’a le Père : même puissance (Jean, v, 17 sqq. ; x, 28-30), même action vivifiante (ibid., v, 21-26 ; vi, 67) ; même science (xvi, 30) ; même nature (x, 30) ; d’un mot il peut dire à ses disciples : « Tout ce qu’a mon Père, est à moi » (xvi, 15), et à son Père : « Tout ce qui est à moi est à toi, et tout ce qui est à toi est à moi » (xvn, 10).

Et il faut remarquer enfin, d’après l’enseignement de Jésus, que ces biens infinis qu’il possède, il les reçoit du Père. Tout ce que le Fils a et tout ce qu’il fait, lui a été donné par le Père. Ainsi le Père lui a donné les œuvres qu’il fait (Jean, v, 36) ; il lui a donné d’avoir la vie en lui(v, 26), il lui a donné pouvoir sur toute chair (xvn, 2), en un mot, comme Jésus aime à le répéter, il lui a tout donné, il lui a tout remis entre les mains (m, 35 ; xiii, 3). Et l’on ne concevra pas cette donation comme une sorte d’investiture universelle conférée dans le principe au Fils par le Père, et l’établissant alors dans une souveraineté indépendante ; c’est une communication constante par laquelle le Père, qui est dans le Fils, agit en lui : « Je suis dans le Père, et le Père est en moi » (xvn, 21) ; 1 les paroles que je vous dis, je ne les dis pas de moi-même ; et le Père, qui est en moi, fait ses œuvres ; croyez-moi : je suis dans le Père, et le Père est en moi, sinon croyez-en du moins mes œuvres » (xiv, 10-11).

Aussi quiconque connaît vraiment le Fils, voit en lui le Père (xiv, 9-10), et cette connaissance, c’est la vie éternelle (xvn, 3).

La révélation du Fils de Dieu remplit tout l’Evangile, la révélation du Saint-Esprit est non pas moins certaine, mais moins lumineuse. Par son incarnation, le Fils nous est apparu en personne, le Saint-Esprit ne s’est révélé que par ses dons ; nous ne connaissons point sa personnepar une manifestation directe et immédiate, mais seulement par ce que les apôtres et le Christ lui-même nous enseignent.

L’action de l’Esprit Saint nous apparaît d’abord dans la conception virginale du Fils de Dieu (Luc, 1, 35), et dans la profusion de grâces qui l’accompagne. Les prophètes (Isaïe, xi, 1-2 ; xiii, 1 sqq. ; lxi, i ; xxxn, 15 ; xliv, 1 ssq. ; Ezéchiel, xi, 19 ; xxxvi, 26 ; xxxvn, ia ; Joël, iii, 1-2 [Vulg., 11, 28-29] ; Zacharie, xn, 10), avaient prédit, à l’avènement du Messie, une abondante effusion des dons de l’Esprit, soit sur le Christ lui-même, soit sur son peuple. L’aurore de ce grand jour apparaît dès la conception du Christ, l’Esprit se répandant sur Jean-Baptiste (Luc, 1, 15), sur Elisabeth (1, li), sur Zacharie (1, 67), sur Siméon (11, 25-27).

Au baptême de Jésus, l’Esprit apparaît sous la forme d’une colombe, en même temps que le Père rend témoignage à son Fils ; c’est, nous l’avons remarqué, une révélation de la Trinité, que le baptême chrétien attestera par la formule imposée par le Seigneur.

Au cours du ministère public, bien des traits manifestent l’action de l’Esprit-Saint sur le Christ (Marc, 1, 12 ; Luc, iv, 14 ; x, 21). Deux paroles de Jésus nous font connaître quelque chose de sa nature et de son rôle dans l’Eglise :