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SUBCONSCIENT ET INCONSCIENT

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qui voit toutes olïOS-oin, pour se Voir lui même, dôtre réfléchi dans le miroir de Inconscience individuelle’. Noos savons qne cette clairvoyance absolue de la pensée inconsciente est infaillible dans la poursuite de ses fins ; que les moyens et les fins sont saisis par elle en un seul Instant, en dehors de toute durée ; et que sa seconde vue embrasse à la fois toutes les données nécessaires à l’exécution de ses desseins -’. Elle est infiniment supérieure à la marche défectueuse, toujours bornée à un point dans ses mouvements, malgré les écha ?ses dont elle fait usage, qui est propre à la rélb xion di cursive ; car celle-ci est toujours dans la dépendance de la perception sensible, de la mémoire et des inspirations de l’Inconscient. Nous pouvons dune définir cette intelligence inconsciente, qui est supérieure à toute conscience, comme une intelligence siipraconscienle. Parla s’évanouissent les deux objections précédentes contre l’inconscience del’Un-Tout. Cet être possède, en effet, Malgré son inconscience, une intelligence omnisciente et souverainement sage, supérieure à la conscience. Et cette intelligence réalise ses lins dans la création et l’histoire du monde ; nous ne sommes donc [dus le produit accidentel des forces de la nature’. Refuser la conscience à Dieu dans de telles conditions, ce n’est pas le rabaisser l. »

Tout d’abord, il paraît bien que Hartmann confonde ici deux choses distinctes. En somme, que veut-il, et avec raison d’ailleurs, écarter avant tout de l’Intelligence absolue ? notre réflexion discursive, avec ses lenteurs ou, en tout cas. son caractère successif 5. Tous les métaphysiciens traditionnels lui donneront les mains sur ce point. Mais où ils se

I. Pourquoi ? Ou affirmation gratuit--, ou paralogisme assez naïf, fondé sur une annlogie trompeuse entre l’œil raiilériel et 1" « œil > spirituel (cf. rép.’iife classique à l’argument positiviste conlre la possibilité de i’inlrospection).

2. Cf. p. "237 : « Tous les. Uributs de l’inlelligence divine (l’oinnisc’i nce, la sagesse absolue, l’omniprésence, l’ubiquité) conviennent à l’intuition clairvoyante et inconsciente de l’Un-Toul, etc. ».

3. Oui. si ce n’est que s/<praconscience proprement dite, c esl-à-dire, en dernière analyse, conscience absolue. Non si c’est absolue inconscience. Cf. dissuasion infra.

4. Philosophie de l’Inconscient, 1. II, p. 215 sq. (Métaphysique de l’Inconscient, cli. VIII ! L’Inconscient et le Dieu du théisme). Il est à remarquer que ce chapitre ne figurait point dans les premières éditions (Cf. O. Nolen, Philosophie de l’Inconscient. Introduction du traducteur,

t. I, p. XYIll).

5. Philosophie de l’Inconscient, t. II, p. 338 : « L’Inconscient ne peut jamais se tromper, pis même douter ni hésiter. Aussitôt que l’apparition d’une idée inconsciente est nécessaire, elle se montre instantanément, embrassant dans l’instant indivisible de son apparition toutes les idées que le processus de notre réflexion déroule successivement et séparément dans la conscience [Remarquer l’habileté ^consciente ou « inconsciente >>] de cette finale : te discours est ainti présenté comme la foi me essentielle dé la conscience, il a plus de chances en tout cas de passer pour tel. Remplacez par : « dans la durée ». et tout change). L’Inconscient, à coup sur, ne connaît pas l’erreur, puisque sa clairvoyance s’éten<l sur toutes les données qne nous concevons sans les connaître, et les embrasse toujours et dans un seul moment. Rien chez lui de cette réflexion consrienle qui va chercher laborieusement dans la mémoire, les unes après les autres, les données des problème ! e-t se trompe si souvent et si complètement sur elles ( « Rien chez lui de cette réflexion consciente » — même observation. Mais la conscience n’y fait ni chaud ni froid.’La ré flexion [== discours, bien entendupeul’Ire consciente, sans que la conscience soit nécessairemenldiscursive, n’y ayant plus dès lors de milieu pour elle entre être discursive ou n’être pas. Lisez : « Rien chez lui de celle réflexion successive [ou discursive] », ce qui d’ailleurs serait bien plus conforme au sens général de la phrase, qui l’appelle ru’me, et Hartmann en sera pour ses

reprendront, c’est quand il s’agira de passer à l’inconscience. Car enfin, qu’est-ce que tout cela peut bien faire à la conscience même ? La conscience est une chose, le discours mental en est une autre.

« Notre impuissance à nous faire une idée positive

du mode de connaissance propre à cette intelligence nous condamne à la définir par opposition avec.notre manière de connaître (la conscience) », pardon : (/ « réflexion discursive), voilà ce qu’en bonne et saine logique il fallait dire. Et dès lors, en bonne et saine logique aussi, c’en est fait de la conclusion que vous tirez : « … et par suite à ne lui prêter d’autre attribut que celui de l’inconscience ». Depuis quand le discours mental est-il une condition ou un élément de la conscience, en sorte qu’on doive tenir pour inconsciente une intelligence qui n’agit que sous la forme supérieure de l’intuition ? Car telle est encore la correction qu’imposerait la vraie suite des idées : … « et par suite à ne lui prêter d’autre attribut que celui de l’intuition ».

Mais c’est plus qu’une confusion qu’il faut relever dans ces pages, c’est une contradiction au pied de la lettre. Hartmann finit par nous dire que cette intelligence « inconsciente », qui embrasse-toutes choses d’un regard unique en dehors de toute durée, peut être définie une intelligence supraconsciente. Qu’entend-il par là ? Car enfin il semble bien qu’on se trouve ici en présence de deux interprétations différentes et, qui plus est, exclusives. Il faudrait pourtant vous déclarer une bonne fois.

Ou bien votre absolu n’est pas conscient du tout, est pour tout de bon inconscient, alors pourquoi faire entrer finalement la conscience dans sa définition, même avec un préfixe et un correctif, pourquoi l’appeler supraconscienn Le préfixe et le correctif ne font ici rien à l’affaire, ou plutôt, si, ils y font beaucoup, mais juste dans le sens opposé au vôtre, car on ne voit pas trop ce ; que cela peut bien vouloir dire, SM^>raconscienl, sinon éminemment conscient, plus que conscient (c’est presque une tautologie), conscient par excellence — ce qui d’ailleurs nous amène au second membre de l’alternative.

Ou bien, en effet, il y a une raison légitime de l’appeler supraconscient : ce sera par exemple et précisément l’absence du discours, sous la forme duquel en (ait notre pensée consciente se réalise et entre en activité, — je veux dire que c’est cela même que supra signifie. Mais alors conscient non seulement reste, mais conserve, au fond, son sens obvie, pour ainsi dire, et naturel. Tout au plus ajoutera-t-on qne, pour cette raison même (exclusion du discours), la conscience qu’on reconnaît à l’Absolu n’est pas tout à fait la même que la nôtre, telle qu’en fait, je le répète, elle se manifeste ; qu’il y a, au vrai, entre les deux beaucoup plutôt une analogie qu’une similitude proprement dite. Et voilà encore, sinon même surtout, ce que voudra dire suPRAconscienf. Mais alors aussi inconscient prend du même coup une autre signification que dès le début, à savoir cette signification même. Dites

« inconscient », soit : vous ne parlez plus cette

fuis que comme les Alexandrins, lorsqu’ils disaient que Dieu n’est pas essence, ni bonté, ni beauté, ni même être, etc., sans doute, mais parce qu’il est quelque chose d’infiniment supérieur à tout cela (tel que nous l’entendons des choses finies et créées et c’est seulement à l’égard des choses créées et

frais d’argumentation tendancieuse, insinuante et enveloppante). C’est ainsi qu’au méms instant les fins futures les plus prochaines comme les plus éloignées, et toutes les considérations relatives à la possibilité d’agir de telle ou telle façon, sont présentes à l’Inconscient … etc. ».