Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 4.djvu/771

Cette page n’a pas encore été corrigée

SUBCONSCIENT ET INCONSCIENT

i. ; jo

des habitudes motrices (ou des souvenirs-habitu- des), qui ne sont pas ici en cause précisément parce j qu’ils reviennent à de simples enregistrements organiques (cf. col. 152Ô, n. i), les souvenirs p ; irs OU les souvenirs-images subsisteraient tout de bon à l’état inconscient et sous leur forme primitive. Il y a pourtant un trait de cette théorie, un détail, si l’on veut, ou une nuance, qui pourrait bien tirer à conséquence plus qu’on ne se le figure peut-être. Dans une suggestive étude sur le rêve, publiée par la Revue rose (scientifique) de 1906, M. Bergson, s’attachant à relever les analogies ou même les ressemblances entre ce type de représentation et la connaissance que nous prenons [tendant la veille des objets qui nous entourent, bien plus à montrer que c’estau fond une môme opération qui s’accomplit d’un côté comme de l’autre, l’ait naturellement état à cette lin de cette espèce d’imprégnation continuelle de la perception par la mémoire, sur laquelle la psychologie a tant et si justement insisté de nos jouis 1. Les souvenirs en cause, remarquel-il,

« profitent en quelque sorte de la- réalisation

partielle qu’ils trouvent çà et là » (d ins les sensations discontinues et fragmentaires qui les amorcent ou les déclenchent) « pour se réaliser complètement ». Ils ne sont donc pas, en tant que tels, en tant que souvenirs, tout à fait réalisés encore ? C’est quelque chose comme un moyen terme entre la possibilité et l’actualité ? Sommes-nous si loin le la virtualité même ? Conclusion d’autant plus engageante, qu’à la lin de tout le morceau on lit phrase, qui n’est pas moins signiiicative : « Il 11e faut pas s’imaginer que nos souvenirs soient dans notre mémoire à l’état d’empreintes inertes : ils y sont, comme la vapeur dans une chaudière, plus ou moins tendus. » On ne peut s’empêcher de penser à Lkiun’iz, lequel, pour illustrer la notion de virtualité (nous sommes bien à notre affaire), se servait volontiers de la comparaison d’une corde

« tendue » par le corps grave qui y est suspendu, 

comme aussi de celle d’un arc bandé ou a tendu », ouod e.vmplis gravis suspensi funem sustinentem rirtendentis, aut arcus tensi, illustrari potest (Erdm. 122"-). Ne voilà-t-il pas derechef qui donne à

: échir ?

Si cette notion, enûn, ne se retrouve pas comme ^n perspective, et à titre d’hypothèse légitime de soi. derrière les lignes suivantes de Ri vers (dans Instinkt and Unconscious, un des livres les plus remarquables qui aient vu le jour en ce domaine depuis la grande guerre), c’est à se demander où il faut la chercher. — De prime abord, Hivers semble, il est vrai, se rallier, lui aussi, à la doctrine de l’inconscient tout court,-c C est un point qui ne fait plus de doute aujourd’hui pour personne, écrit-il (A p pend. V, p. 281 de la trad. fr. [Paris, Alcan|) que, en dessous des trains d’idées régulièrement ordonnés selon les lo : s de la logique qui forment le contenu de la conscience claire, nos expériences anciennes se conservent et s’agrègent en des systèmes psychiques inconscients. «.Mais, outre que la million expresse de la conscience claire réserve, pour ainsi parler, les droits éventuels du subconscient (il est toujours opportun d’y revenir), reste à savoir ce que peuvent bien être en eux-mêmes ces t systèmes psychiques inconscients ». Or ce n’est ^ans raison, ou plutôt sans un dessein réfléchi, |ne l’auteur dit à cet égard « expériences anciennes » : « il y a intérêt, déclare-t-iï en un autre endroit (Appen l. F, p. 20’ « -5), à parler d’expérience inconsciente plutôt q’ie de faits mentaux incons 1. Cf. v. g. Foujaul’", L Pi’jehopy tique, 1* p., eh, 1.

cients. Tout le monde admettra sans peine, en effet, (pie les hommes adultes ont été sujets à, un grand nombre d’expériences qui ne leur ont laissé aucun souvenir précis et qui n’ont même pas atteint leur conscience claire. Chacun est prêt à reconnaître aussi, je crois, que ce corps d’expériences conservé sous forme inconsciente indue sur nos pensées et sur nos actes, sur nos impressions et nos sentiments. — En parlant d’expériences inconscientes, nous demeuronssur le terrain des faits’, « sans avoir à connaître la forme sous laquelle seconseive cette expérience. » C’est donc qu’elle peut, au moins, se conserver sous une autre forme ([ne celle de phénomènes proprement dits ou (cf. supra) île « faits mentaux inconscients » 2 7 Or telle est juste notre hypothèse à nous.

Enoore une fois, il valait la peine de faire voir que cette idée de virtualité, et même de puissance, n’effraye pas, le cas échéant, les esprits les plus férus d’explication positive et concrète. Elle les effraye si peu <[ue, le cas échéant, ils ne laissent pas d’y avoir recours, comme de simples métaphysiciens.

C. — Su jconscieat et dédoublements de la personnalité.

1. Les phénomènes pathologiques en cause. — Reste un dernier groupe d’hypothèses auxquelles a donné lieu la constatation du subconscient ; ce sont celles qui se rapportent aux dédoublements de personnalité, du moins et en première ligne aux dédoublements simultanés. Il s’agit cette fois de faits pathologiques, nolaminentdes curieuses expériences enregistrées dans l’ouvrage classique d’Alf. Binet (Les Altérations de la personnalité, 1884) et, plus enoore, des conclusions que les psychologues de l’école expérimentale en ont tirées contre la conception traditionnelle du sujet intérieur.

Un éclaircissement préliminaire devient ici indispensable. On constate chez la plupart des hystériques, examinées en dehors de leurs crises, un stigmate assez curieux, consistant dans une insensibilité plus ou moins complète, généralement limitée à une région du corps, tels un bras, un main ou un œil, et à laquelle il ne paraît pas que corresponde aucune lésion organique appréciable*. Ajoutons que la distraction équivaut souvent chez

1. Ne faudrait-il pas mieux dire, pour éviter ici toute équivoque : « sur le terrain de l’observation positive, immédiate » ? Rivers se propose précisément d’établir que

« faits mentaux inconscients > est moins l’expression qu’une

interprétation, discutable, du donné. — C’est nous qui soulignons, bien entendu.

2. V. g. et co nme nous lisons ailleurs (p. lll), sous la forme de ce « je ne sais quoi » qui fait que, dans certaines circonstances, nous éprouvons telle impression déterminée, de froid ou autre. Hivers ne recule même pas devant le mot « faculté ». — Il est remarquable que dans son récent livre, L’Intelligence, M.BoURDON s’exprime à peu près dans le même sens. A propos de ces phénomènes (psychologiques inconscients ou supposés tels), écrit-il, il est intéressant de distinguer les disposition-, qu’on pourrait encore appeler des aptitudes ou des états, et les opérations ou processus. On comprendra l’utilité de cette distinction en comparant (comparaison lumineuse) « ce qui a lieu dans les cas d’activité musculaire : l’aptitude, la disposition à exécuter de nouveau un mouvement appris diffère du processus qui consiste à exécuter soit réellement, soit meutulement ce mouvement ; nous n’écrivons pas d’une manière invisible, quand, sachant écrire, nous n’écrivons pas réellement. » (p. lô") Cette disposition ou aptitude est pourtant quelque chose, qui subsiste dans l’intervalle des opérations ou processus actuels. Alors ?

3. Voir, poir les détails, op. cit., p. 84 sq.