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SLAVES DISSIDENTES (ÉGLISES)

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l’Ukraine comprise, 1 36 évoques, dont 119 en activité de service, et 17 en retraite ou démissionnaires. Parmi eux, 4’i sont mariés, 49 sont veufs, 3<j sont d’anciens moines, un seul est qualifié de célibataire. Le président du Synode est le métropolite de Leningrad, Benjamin (dans le siècle, Basile Antonovitcb Mouratovskii), né en 1856, Wiédensky fait aussi partie du Synode, avec le titre d’apologète-évangéliste. Cf. le Viestnik ou Messager du Saint-Synode, n’1 2- 1 3 (décembre 1926). Très habilement, elle a reconnu l’autonomie de l’Eglise ukrainienne, pour endiguer le succès des auto-consacrés, dont nous avons parlé plus haut. Reconnaissons qu’elle a de sérieuses chances de durer et de se développer. Elle constituerait une sorte d’intermédiaire entre l’anglicanisme et l’orthodoxie grecque.

Les autres Eglises rouges, y compris celle du fameux évoque Antonin. sont en train d’agoniser. Quant à l’Eglise conservatrice des Tikhoniens, qu’on appelle aussi patriarchistes, et qui représente l’Eglise officielle d’avant la Révolution, elle groupe encore autour d’elle la majorité des croyants orthodoxes. Mais la vacance prolongée du trône patriarcal lui cause beaucoup de tort. Le troisième gardien du trône patriarcal, Pierre de Krouty, a été arrêté par les Soviets à la fin de 1925. Il a été remplacé par un Conseil suprême ecclésiastique provisoire, qui avail décidé la convocation d’un concile pour la fin de l’été de 1926. Ce concile n’a pu avoir lieu, par suite de l’hostilité des Soviets. La plupart des évêques tikhoniens ont été envoyés en exil. Leur chef était tout récemment Mgr Serge Starogorodskii, métropolite de Nijni-Novgorod. Les Tikhoniens maintiennent le célibat des évêques, tiennent pour le patriarcat, gardent le calendrier julien et les anciens usages.

Les deux millions de Russes qui se sont expatriés un peu dans tous les pays, se sont organisés en une sorte d’autonomie ecclésiastique, dirigée par un Synode établi à Carlovitz, en Yougoslavie, sous la présidence du métropolite de Kiev, Antoine Khraporitski. En 1919, ils tinrent à Carlovitz un premier concile, qui proclama, à la majorité des voix, la solidarité de l’Orthodoxie russe et de l’autocratie, désignant comme successeur au trône des Romanof le grand-duc Nicolas Nicolaiévitch. Cette motion politique, qui eut pour effet d’intensilier la persécution soviétique en Russie, les brouilla avec le patriarche Tikhon, qui condamna leur Assemblée. Mais entre eux et les Tikhoniens, il ne paraît y avoir qu’une divergence de vues politiques. Sur le terrain religieux ils s’accordent, et on peut les considérer comme les représentants les plus authentiques de l’ancienne Eglise officielle. Au dernier synode de Carlovitz, en 1926, la brouille s’est, du reste, mise parmi eux. On peut dire que l’Eglise de la Dispersion est actuellement partagée entre trois obédiences : celle du métropolite Antoine, qui siège à Carlovitz ; celle du métropolite Euloge, chef des dispersés de l’Europe occidentale ; et celle du métropolite Platon, pasteur des dispersés d’Amérique. La cause de ce petit rascol a été l’accusation d’hérésie lancée contre le métropolite Antoine, qui dans son Catéchisme, publié en 192/ », et aussi dans un récent opuscule sur le Dogme de la Rédemption, niepositivement le dogme chrétien et orthodoxe sur le péché originel et la Rédemption. Cf. Orientalia christiana, n* 32 (février 1 92^). Les partisans d’Antoine et d’Euloge se disputent, en certains endroits, les églises et les chapelles.

Nous n’avons pas de renseignements précis sur le développement des sectes Starovièret, depuis la Révolution ; mais on devine bien qu’ayant la faveur

des Soviets, elles ont dû prospérer. Ceux des Popovtsy qui jusqu’ici ne s’étaient pas ralliés à la hiérarchie de Biélokrinitza, dont nous avons parlé plus haut, ont trouvé un évêque en la personne de Nicolas de Saratov, en 1926. Des pourparlers unionistes ont commencé entre eux etlesBiélokrinitziens. Quant aux sectes rationalistes et protestantisantes, leur succès est, parait-il, considérable, surtout dans la Russie méridionale. Les plus répandues sont celles des Baptistes, des Chrétiens évangéliques, des Adventistes du septième jour et des Cinq un nteniers ou Piutidéciatnihi. Elles attirent surtout les masses ignorantes des campagnes. Les missionnaires protestants d’Amérique s’emploient activement à les aider.

Si à toutes ces hiérarchies rivales et à tout es fourmillement de sect « s vous ajoutez la déchristianisation systématique du peuple russe, poursuivie par les Soviets, qui, depuis 1923, n’ont donné quelque répit à la persécution violente que pour intensifier la propagande athée par l’image, le journal, la revue, le livre, les conférences et par-dessus tout l’école, vous conclurez que l’avenir de l’Eglise russe s’annonce sous les auspices les plus noirs. Il y a un siècle, Joseph de Maistre écrivait : « Si l’empereur de Russie retirait tout à coup la puissante main qu’il tient étendue sur la religion ; s’il excluait son ministre du siège qu’il occupe dans le Synode ; s’il permettait à ses prêtres de tous les ordres de prêcher, d’écrire, de dogmatiser et de disputer comme ils l’entendraient, en un clin d’oeil, il verrait sa religion s’en aller en fumée… En peu d’années, le symbole serait mis en thèses et bientôt en chansons ». Sur l’état du christianisme en Europe, § 3 et 4. Les événements ne justifient que trop, jusqu’ici, cette prédiction sinistre. Souhaitons qu’une élite, parmi les Russes émigrés, déposent, au contact des catholiques d’Occident, les préjugés tenaces contre l’Eglise romaine qu’ils tiennent de leur éducation première, et que, de retour dans leur patrie, redevenue habitable et hospitalière, ils inaugurent l’Eglise de la Renaissance catholique, qui ramènera la Russie chrétienne au temps d’Olga et de Vladimir.

BIBLIOGRAPHIE. — I. SUR L’HISTOIRE DR L’EOLISB RUSSE.

— MacaireBoulgakov, Histoire du christianisme en Russie jusqu’au hniaze Vladimir, Pétcrsbourg, 1868 ; du même, Histoire de l’Eglise russe, 13 vol. (va jusqu’au concile de Moscou dt 1667) ; Piiilaretb Goumilevsku, Histoire de l’Eglise russe, 6e éd., Pétersbourg, 18y4 (Manuel assez Insignifiant, qui va jusqu’à l’année 1826 ; traduction allemande par Blumenthal, Geschichte der Kirche Russlands, 2 vol. Francfort, 1872) ; E. Goloubinskii, Histoire de l’Eglise russe t. I (en deux parties) et t. ii, ae éd., Moscou, 1901-190^ (va jusqu’à la mort du métropolite Macaire(15(J3). C’est l’ouvrage le plus sérieux sur les origines de l’Eglise russe) ; A. Dobroklonskii, Manuel d’histoire de l’Eglise russe, 2 vol., Riazan et Moscou, 1889-1893 (a l’avantage de conduire l’histoire de l’Eglise russe jusqu’à la période contemporaine) ; Rounkbvitch, Histoire de l’Eglise russe sous le gouvernement du Saint-Synode. Pétesbourg, 1900 ; A. Leroy-Bi alliku, L’Eglise russe, Paris, 1889(3* volume de l’ouvrage L’empire des tsvrs et les Russes ; décrit bien l’état de l’Eglise russe pendant la période synodale) ; A. N. Mouraviev, Histoire de l’Eglise russe, Pétersbourg, 1838 (petit résumé, qui a été traduit en anglais, en allemand et en grec moderne) ; Strahl, Geschichte der russischen Kirche, Halle. 1830 ; A. ThbinbR, L’Eglise schismatique russe d’après les