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SAPIENTIAUX (LIVRES)

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.Mon (ils, n oublie pas mes enseignements

et que ton cœur garde mes préceptes.

Ils te procureront de longs jours,

des années de vie et la paix…

Heureux l’homme qui a trouvé la sagesse…

Dans sa droite [de la sagesse] est une longue vie,

dans sa gauche, la richesse et la gloire.

Ses voies sont des voies agréables,

tous ses sentiers sont des sentiers de paix.

Elle est un arbre de vie pour ceux qui la saisissent

et celui qui s’y attache est heureux.

[Prov., iii, 1 suiv. 13-18).

Les maximes de Salomon n’ont pas d’autre langage :

La crainte de Y ah web. augmente les jours,

mais les années des méchants seront abrégées.

L’attente des justes aboutit à la joie,

mais l’espérance des méchants périrai

La voie de Yahweh est un rempart pour le juste,

mais elle est une ruine pour ceux qui font le mal.

Le juste ne chancellera jamais,

mais les méchants n’habiteront pas la terre.

(Proc x, 27-30).

Ce sont là des traits pris au hasard, au commencement des deux premières et plus importantes sections du livre des Proverbes ; inutile d’allonger les citations qu’on pourrait aisément multiplier. Bref, on ne nous parle que du bonheur d’ici-bas, on ne songe pas à une autre vie au delà du tombeau. L’Ecclésiastique, sous ce rapport, ne s'élève pas au dessus des plus anciennes parties des Proverbes. L’Ecclésiaste a même été accusé d’hédonisme, d'épienrisme.

Mais remarquons d’abord, que la morale de nos livres est toute pénétrée du noble motif de la religion. Nous les avons déjà entendus pose r en axiome, que la crainte de Dieu est le principal de la sagesse.

Il n’y a ni sagesse, ni prudence,

ni conseil, en fac*e de Yahweh (Prot : , xxi, 30),

c’est à-dire à Lui tenir tête, comme traduit Ledrain. Est-ce par crainte de ses châtiments, qu’on doit craindre Dieu ? Est-ce pour se le rendre favorable et jouir de ses dons, richesse, longue vie etc., qu’on nous invite à l’honorer ? Pas toujours. Pour tout motif de fuir telle action, tel vice, on apporte souvent, que « Yahweh l’a en horreur « ; et par contre, on pousse à la vertu pour la raison qu’elle

« est agréable à Dieu » Prov, , iii, 32 ; xi, i ; xii, 

22 ; xv, 9. 26, etc.) ; par exemple :

Le sacrifice des méchants est en horreur à Yahweh, mais la prière des hommes droits lui plaît. La voie du mécliant est en abomination à Yahweh ; mais il aime celui qui poursuit la justice.

{Prov., xv, 8 suiv.)

Ce grand principe de vie morale, quetoutse passe sous les yeux de Dieu, est fréquemment inculqué ;

Las yeux de Yahweh sonten tout lieu,

observant les méchants et les bon-' (/Voi'., xv, 31) :

et avec plus de développement dans l’Ecclésiastique ;

Il leur a dit [Dieu aux hommes] ; Gardez-vous de

« [toute iniquité, 

et il leur a donné à chacun des prescriptions à IV [gard du prochain. Leurs voies sont constamment devant lui rien ne peut te dérobera son regard… L'œuvre charitable d’un homme est pour lui comme

[un sceau et il conserve le bienfait de l’homme comme la

[prunelle de l'œil. (Eccli., xvii, 12 suiv., 1").

L’Ecclésiaste lui-même, lorsqu’il invite à jouir honnêtement des biens de la vie, rappelle, que c’est un don de Dieu (m, 13 ; v, 17 suiv. ; 11, 2/1-26 ; vin, 15), que tout dépend de Dieu et que « Dieu agit ainsi alin qu’on le craigne » (m, 1 4). Sa doctrine sur l’usage du plaisir, par cela même que Qohéleth veut qu’il soit modéré, jamais séparé de la crainte de Dieu (vu, 16-18) et accepté avec reconnaissance de la main de Dieu comme remède aux douleurs de la vie (v, 17-10, ; viii, 15), est bien éloignée de l'épicurisme, est bien loin de faire du plaisir le but de l’existence. Au contraire, Qohéleth s'étend longuement à montrer la A-anité du plaisir cherché pour lui-même (11, 1-11). Sa morale n’est pas achevée, comme d’ailleurs tout l’Ancien Testamentn’a rien produit d’achevé (Ilébr., vii, 19) ; mais, si on ne la faussepoint, elle est saine ; elle enseigne la vertu, quoique pas toute la vertu. Voir E. Podech.ird, L’Ecclésiaste, p. 189-196.

Tout cela n’est pas de l'égoïsme, ce n’t st pas de la morale utilitaire. Remarquons ensuite, que les Livres sapientiaux ne sont pas, ni ne veulent être, des traités de morale complets et ordonnés, d’allure scientifique. Ils sont des recueils de conseils pratiques, et ils veulent aider par là à la formation du peuple, surtout de la jeunesse. Dans ce but pédagogique, ils choisissent de préférence les motifs qui ont plus de prise sur l'âme du peuple, surtout des jeunes gens.

Sans doute, les Livres sapientiaux proclament hautement, que Dieu rendra à chacun selon ses œuvres (Prov., xii, l ; xxiv, 12 ; Eccli., xvi, 1114 ; Eccle., xii, l ; etc.) ; c’est la loi de justice qui régit le monde. Sans doute aussi, pour le mode et le temps de la rétribution, nos. livres en sont restés généralement aux lueurs imparfaites de l’Ancienne Loi, dont la perspective ne dépassait guère la vie présente. Toutefois l’existence d’une autre vie, ou l’immortalité de l'âme, est toujours supposée. Nos livres mentionnent maintes fois le scliéol et les rephaïm (voir tome III, col. 484). La vie qu’on mène dans ce « séjour des morts » nous est bien peinte comme une vie floue, pâle, silencieuse et inactive ( « Il n’y a plus ni œuvre ni intelligence, ni science, ni sagesse, dans le schéol ou tu vas » nous dit Qohéleth, ix, 10) ; ce n’est pas la vie tourmentée, agitée, changeante de ce monde ; mais en somme, c’est une vie. Pour ce qui touche à l’Ecclésiaste en particulier sur ce point, voir A. Cundamin, Etudes sur l’Ecclésiaste, dans liev. bibl., 1899, p. 493-502 ; 1900 p. 3^1 ss. ; E. Podbchard, l’Ecclésiaste, p. 186-189 ; E- Tobac, Les cinq livres de Salomon, p. 68-75.

De plus, les endroits ne manquent pas dans lelivre des Proverbes, où on laisse entrevoir une différence de traitement entre justes et méchants, même après la mort : quelque chose comme une existence pire que la mort pour les méchants, une vie heureuse pour les justes. Ainsi ix, 18, il est dit, que les convives de « daine folie » (le conlrepied de la sagesse) gisent au fin fond du schéol, là où d’autres livres de l’Ancien Testament placent lesplusgramls coupables pour y être punis (fs., xiv, 9-20 ; /.' :., xxiii, 1 8-32). Même idée et expression peu différente, Prov., vii, 27. Ailleurs, nous lisons de la mauvaise femme, que « sa maison penche vers la mort et sa route conduit aux enfers ; de tous ceux qui vont à elle, nul ne revient, aucun n’arrive aux sentiers de la vie » (11, 18 suiv.). Ne dirait-on pas d’une vie qui devrait se retrouver après la mort du corps ? Ainsi, lorsque la vie sans restriction est promise à l’homme vertueux(iu, 1 8 ; viii, 35 ; x, lôsuiv. ; xi, 30 ;xii, 28), rien n’empêche de l'étendre à cette existence <ie