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SAINT-OFFICE

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Ces empiétements devinrent si grands que le I pape s’en plaignit à Charles V, mais en vain. En 13^6, le roi prétendit conserver pour lui seul le produit de toutes les confiscations prononcées par l’Inquisition du Dauphiné. Lorsque, après le grand schisme, le pape Sixte IV, en î^G, voulut rendre au Saint Olfiee dauphinois toute son indépendance, il se heurta auxsusceptibilités de Louis XI, hostile à toute autorité qui prétendait s’exercer en dehors de celle du roi.

Dans l’Italie du xui* siècle, l’Inquisition fut d’autant plus active que plus puissants et plus nombreux étaient les hérétiques en Lombardie, en Vénélie, en Toscane et jusque dans Home. Contre eux, les Dominicains Raynier Sacchoni.de Milan, Saint Pierre martyr de Vérone, et Jean de Vicence avaient déployé beaucoup de zèle et une grande rigueur. Mais même dansées états italiens où l’Eglise ne rencontrait pas devant elle des pouvoirs aussi forts el aussi jaloux que ceux des rois de France et d’Angleterre, l’autorité inquisitoriale tinil par tomber sous la suprématie civile. Le sermcntque prêta, en 1249. le doge Marino Morosini, nous montre qu’à Venise, les sentences de l’Inquisition étaient soumises à l’exequalur du Conseil. Un document de 1256nous prouve que les hérétiques y étaient poursuivis non seulement par l’Inquisition, mais aussi par les magistrats séculiers ; et un autre de 1288, que la République gardait pour elle les biens contisqués aux hérétiques pratique que le pape Nicolas IV dut approuver le, 28 août 1288 (Lba, op. cit., t. II, p. 301). Dans le royaume des Deux-Siciles, Charles d’Anjou favorisa l’Inquisition, parce que les ennemis de l’Eglise étaient aussi les siens ; mais ses successeurs ne tardèrent pas à la placer sous leur étroite dépendance. Auxiv’siècle, les inquisiteurs devaienï soumettre leurs sentences à l’homologation des tribunaux royaux ; et les hérétiques étaient enfermés dans les prisons sécu’ières (Lea, op. cit., ibid., p. 331j). Le peu de vitalité qui restait à l’Inquisition fut encore affaibli en 1 44-3-, quand la maison d’Aragon obtint la couronne de Naples. Giannonk (dans son Histoire de.aples) nous dit que les princes d’Aragon admettaient rarement les inquisiteurs ; encore exigeaient-ils, quand ils consentaient à laisser agir le Saint-Oflice. que les fonctionnaires inquisiloriaux leur remissent des comptes rendus détai I lés de tout acte oïliciel ; ilsn’autorisa ent les condamnations qu’avec le concours des magistrats séculiers et sous réserve de la ratification royale. » (Lka. ibid. p. 3/, il).

En Allemagne, le Saint-Office avait débuté parles exéeulionscruelles ordonnées par le terrible Dominicain Conrad de Marl>ourg (cf. notre article Inquisition, dans ce Dictionnaire) ; mais le meurtre de cet inquisiteur, le 31 juillet 1233, fut le signal d’une réaction contre l’Inquisition. La plupart des évoques et des princes de l’Empire en prolitèrenl, les premiers pour revendiquer pour la seule autorité épiscopnle la répression de l’hérésie, les seconds pour la réserver aux tribunaux séeuliers. Pendant plus d’un siècle, >< on ne constate aucun essai, aucune nomination, aucune mission d’inquisiteurs germaniques… L’absence de l’Inquisition pontiticale est attestée d’une façon signilicative par les coutumiers de l’Allemagne au Moyen Age ; il n’y est fait aucune mention d’une institution telle que leSaint-Ollice. » (Lba, ii/>. cit., Ibid.., p. 4’5).

Pour retrouver des traces de l’Inquisition pontificale dans l’Empire, il faut se reporter à un siècle plus tard. En 13156, un moine augustin. Jordan, fut nommé par le Saint-Siège inquisiteur dans les deux districts de la Saxe ; mais la longue lutte qui se

poursuivait alors entre l’empereur Louis de Bavière et le pape, protégea contre l’action des inquisiteurs tous les hérétiques, alliés de l’empereur. Il n’en fut plus ainsi lorsque, après la mort de Louis de Bavière, des relations cordiales s’établirent entre Charles IV de Luxembourg, son successeur, et le Saint-Siège. En [.Sôa, le pape Innocent VI essaya d’organiser, dans toutl Empire, la répression de l’hérésie ; mais il se heurta, comme-ses prédécesseurs, à l’opposition desévêques, dont plusieurs — tels les électeurs ecclésiastiques — étaient des princes. Ce ne fut qu’à partir de 13 ; 3, sous Grégoire XI, que l’Inquisition pontilicale fonctionna dans l’Empire germanique, un siècle et demi après son institution par Grégoire IX, un siècle et demi avant Luther.

On lui attribue le supplice de Jean Hus et de. son disciple Jérôme de Prague, en itb, parce que l’action qui aboutit à leur condamnation fut faite d’après la procédure inquisitoriale. En réalité, ce fut non l’Inquisition, mais le Concile de Constance lui-même, qui engagea l’affaire, jugea les accusés sur les réquisitions de ses propres commissaires, après avoir dirigé les interrogatoires et toute la procédure. Ajoutons qne l’historien protestant Lea, qui exalte Jean Hus, reconnaît que les Pères du Concile multiplièrent les efforts pour sauver le coupable en obtenant de lui une rétractation (op. cit., t. II, pp. 588-689).

Malgré l’appui malheureux que donna à Raymond VI, comte de Toulouf-e, contre Simon de Montfort, le roi d’Aragon Pierre, le vaincu de Muret, il te semble pas que l’albigéisme ait pénétré sérieusement dans la péninsule ibérique ; les hérétiques qu’on pouvait y rencontrer étaient des personnalités isolées ou des étrangers chassés du Languedoe. Aussi la répression de l’hérésie y fut-elle aussi faible qu’elle était énergique de l’autre côté des Pyrénées. Jusqu’en 1326, on n’y trouve traces d’aucune sorte d’inquisition.

Tandis que, dans le midi de la France, ce furent les papes, ayant pour instruments les Ordres mendiants, qui établirent et tirent fonctionner l’Inquisition pontificale afin de suppléer à l’inaction des seigneurs et des évoques du pays, dansles royaumes espagnols ce furent les rois qui prirent l’initiative de la répression de l’hérésie, dès qu’elle se montra dans leurs Etats.

En 1226, Jaime, roi d’Aragon, interdit à tout hérétique l’entrée de son royaume ; deux ans plus tard, il « exclut de la paix publique » les hérétiques, leurs hôtes et leurs partisans et, pour les découvrir, il demanda au pape Grégoire IX des inquisiteurs. En 1233, à Tarragone, il promulgua tout un Code contre l’hérésie et les fauteurs d’hérésie ; mai », dans la procédure qu’il instituait, il réservait le rôle important aux officiers royaux ; celui des évêques et des clercs demeurait subalterne.

Ainsi encouragée par le pouvoir civil, l’Eglise chercha, dès lors, à organiser, en Espagne, l’Inquisition pontificale, telle qu’elle fonctionnait dans le midi « le la France. Ce fut l’œuvre de saint Raymond de Peflafort, de l’ordre des Prêcheurs, canoniste du pap », puis celle de Grégoire IX, d’Innocent IV et d’Urham IV, qui consolidèrent le Saint-Office en le confiant aux Dominicains.

L’Inquisition ne semble pas avoir déployé une grande activité dans la seconde moitié du xiiie siècle et les rois d’Aragon durent l’activerpar plusieurs édita ; en 1286, Alphonse II ordonna à tous ses fonctionnaires de se mettre à la disposition des inquisiteurs, et en 1292, Jaime II crut nécessaire de le leur rappeler.

On signale des cas assez fréquents de répression, au commencement du xiv » siècle ; mais bientôt, les