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minuée. Mais on peut s’attendre à voir s’ouvrir le conflit, dont la France donne aujourd’hui le spectacle chronique, entre le cléricalisme étroit de l’Eglise et l’anticléricalisme exaspéré de l’Etat. Dans une page brillante et attristée, l’auteur évoque la vision de Westminster, parlement et abbaye, centre national de la vie politique et religieuse.

7) Les Conférences de Lambeth, assises décennales de î'épiscopat anglican, inaugurées en 1867, font l’objet du dernier chapitre. On se réunissait dans un but de consultation et d’encouragemont ; il avait été stipulé qu’on n'émettrait aucune déclaration de foi ; que les questions brûlantes, touchant les conflits entre les cours ecclésiastiques et les conseils de la couronne, seraient écartées du programme. Elles ne purent être éludées. Du moins la Conférence affirma-telle expressément ne prétendre aucunement faire œuvre doctrinale.

Il est piquant d’entendre un membre distingué de I'épiscopat anglican reprocher aux conférences de La-mbeth leur tendance à magnifier I'épiscopat. D’ailleurs, le D 1 ' Henson constate que, dans une assemblée où la majorité représente des Eglises non établies ou désétablies, la position des évêques de l’Etablissement est irrémédiablement fausse. Un exemple typique de cette confusion est fourni par la récente conférence, rendant facultatif l’emploi du Prayer Book. Des trente-neuf articles on n’ose plus parler, chacun sentant qu’ils ont fait leur temps, et nul ne voulant prendre sur lui de liquider quatre siècles d’anglicanisme dogmatique.

La même conférence, mue par un généreux désir de restaurer l’unité visible de l’Eglise, a lancé un éloquent appel à tous les chrétiens, digne de trouver un écho profond dans le monde entier. Elle répudie toutes les distinctions historiques, montrant dans le schisme, quel qu’il soit, une disgrâce qui afflige le corps entier. Elle rappelle, comme programme d’union, les quatre articles fondamentaux de Lambeth (1888), en faisant grâce du quatrième, sur I'épiscopat historique : au lieu de I'épiscopat, le ministère est mis en avant comme principe d’unité, sans préjudice de cette assertion, appuyée sur l’histoire et l’expérience présente, que tout ministère procède de I'épiscopat. — Mais cela même paraît excessif au D r Ilenson : n’est-ce pas une abdication pure et simple qu’on demande aux dissidents ? La sommation est dure, et quel espoir d’union y peut-on fonder ?

Nous ajouterons de brèves réflexions.

De ce document, il paraît résulter d’abord qu’il existe un anglicanisme radical, plus protestant que jamais, pour qui la Réforme n’est pas un accident fatal, survenu il y a quatre siècles et brisant l’unité de la chrétienté, mais bien l'émancipation d’un long servage et une étape bienfaisante dans la marche de l’Eglise vers ses éternelles destinées.

Il résulte encore que le terrain où s’organise cet anglicanisme radical, contre les tendances catholiques, est celui d’une identité pure et simple entre l’Etat et l’Eglise. On part de ce postulat, que toute unité nationale doit vivre, religieusement, d’une vie propre. Pour autoriser ce postulat, on invoquait, il y a trois siècles, le précédent biblique du peuple de Dieu. On invoque aujourd’hui plutôt l’expérience présente et les exigences de la vie moderne.

Il résulte encore que cet anglicanisme radical réprouve énergiquement tous les efforts d’un autre anglicanisme pour se croire catholique : il les réprouve au nom des origines anglicanes, et fait siennes toutes les dé larations de la papauté, louchant l’impossibilité de retrouver dans la succession anglicane le sacerdoce tel que l’entend l’Eglise romaine.

Il résulte encore, que cet anglicanisme radical re proche à l’anglicanisme traditionnel son attachement au principe de I'épiscopat, comme à un reste d’institution médiévale, conservé par raison politique et désormais sans objet bien défini ; sorte d’anachronisme dans le protestantisme du vingtième siècle.

Il résulte enfin que cet anglicanisme radical demande, non aux traditions du christianisme, mais aux conditions changeantes de la vie politique et sociale du peuple anglais, la règle de son attitude chrétienne. Et ceci donne la mesure de sa valeur religieuse.

Un autre livre, diversement représentatif, a paru sous ce titre : Anglican Essars. A collective Review of the principles and spécial opportunilies of the anglican communion ascatholic and reformed. London, 1933. Les distingués auteurs paraissent avoir poursuivi de concert un but de rééducation anglicane. Ils sont sept (The Archbishop of Armagh ; Rev. R. H. Murray ; G. G. Goulton ; The Archdeacon of Chester (éditeur) ; The Archdeacon of Macclesûeld ; Rev. Cli. E. Raven ; Archbishop Lovvther Clarke : — feu Bishop Jayne). Dès la préface, on apprend que l’anglicanisme occupe dans le monde une position centrale ; et le développement répond à ce programme insulaire. Il s’agit deressaisir l’esprit public, en passe d'échapper à l’influence anglicane ; et l’effort se porte sur le point où la menace paraît plus sérieuse : face à Rome et au moderne anglo-catholicisme. Aussi voyons-nous reparaître tous les vieux clichés de la Réforme ; tous les griefs anglicans contre l’Eglise romaine, jusqu’auxaccusatious d’idoIàtrie visant le saint sacrifice de la Messe, le culte de la Sainte Vierge et des saints. Dans ce livre, où coule à pleins bords l’esprit de libre examen, avec un parti-pris odieux de dénigrement, on a parfois la consolation de rencontrer un hommage ému et sincère au Seigneur Jésus, seul nom en qui tout homme puisse être sauvé.

IV. Anarchie doctrinale- — L’opposition des deux tendances qui viennent d'être décrites, sous les noms généraux d’anglo-catholicisme et de protestantisme, suffit à marquer l’absence d’autorité doctrinale au sein de l’anglicanisme. C’est d’ailleurs un fait évident, et dont beaucoup d’anglicansconviennent, non seulement avec une parfaite bonne grâce, mais sans aucun embarras, leur éducation ne les ayant pas habitués à sentir ce qu’une telle position a d’anormal aux yeux du catholique romain.

Ce fait est rendu particulièrement sensible par les enquêtes théologiques auxquelles seprète volontiers l’anglicanisme, et dont les comptes rendus étalent avec une entière candeur, sous les yeux du public, les divergences les plus extrêmes delà pensée anglicane. Citons un exemple de cette franchise, qui honore grandement le caractère anglais. Au mois d’octobre 1900, quinze notables, ecclésiastiques ou laïques, appartenant aux nuances les plus diverses de l’anglicanisme, se rencontraient à Fulham palace pour conférer, sous le haut patronage de l'évêque de Londres, sur la doctrine delà sainte communion. La conférence dura trois jours. On possède les procès-verbaux : ils manifestent une extrême diversité de vues, depuis la croyance romaine au sacrifice et à la présence réelle, jusqu'à un rationalisme qui volatilise presque toute donnée traditionnelle. The Doctrine of Boly Communion. Report of a Conférence held at Fulliain palace in october 1900 ; edited by Henry Wace, chairman. London, 1900. — Une autre conférence, en 190a, sur la confession, aboutit à des résultats semblables.

On sait que le mouvement ritualiste, ainsi que le