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REFORME

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clergjrmen et gradés d’université. On a évalué à plus de trois cents les conversions, suite immédiate de celle de Newman, et le mouvement devait se continuer les années suivantes ; à vrai dire, depuis lors, il ne s’est plus arrêté. Rien de pareil ne s’était vu depuis la Réforme. » Tiiurkau-Dangin, op. cit., p. 32a.

La conversion de Newman ne fut consommée qu’en iS45. Néanmoins on peut la tenir pour déterminée en principe dès 184 1 par l’expérience du tract go : l’Kglise d’Angleterre s’était montrée décidément réfractaire à la somme de vérités imposée par l’héritage chrétien. Quelques années plus tard, de nouvelles expériences déterminèrent la conversion de Manning (i 807- 18ga) r archidiacre de Chichester depuis iS/|0. Ce furent très particulièrement Va/faire Hampden (18/17) et l’affaire Gorham (iS^-jllampden, professeur de théologie à Oxford, fut, malgré des opinions notoirement hérétiques, désigné pour l’évèché d’IIereford.Gorham, qui ne croyait pas à la régénération baptismale, fut présenté par la couronne pour une cure du diocèse d’Exeter. L’évêque Phillpotts lui refusa l’investiture. L’affaire fut portée d’abord devant le Conseil des Arches, puis devant le Conseil privé de la reine. Gorham triompha. Dès lors, la conscience très droite de Manning ne put se dissimuler que l’Eglise anglicane, communiant à l’hérésie, ne pouvait être la vraie Eglise du Christ. Il abjura le G avril 1851. Vers le même temps, entraient dans l’Eglise catholique d’autres anglicans de marque : Henry et Robert Wilberforce, tous deux beaux-frères de Manning et frères de l’évêque anglican d’Oxford ; Hope, Maskell, Allies, Dodsworth, Bellasis ; parmi eux, plusieurs membres du clergé de l’église S. Saviour’s, fondée par Pusey à Leeds et par lui énergiquement maintenue dans la via média entre anglicanisme et romanisme.

L’afflux de convertis distingués, dont plusieurs, après une courte épreuve, apportaient dans les rangs du clergé catholique une formation principalement anglicane, ne laissait pas de poser certains problèmes délicats devant l’Eglise catholique d’Angleterre et particulièrement devant son clergé, peu nombreux, rendu ombrageux par un long effacement, et généralement inférieur, par sa culture générale, aux nouveau-venus. L’homme providentiel fut alors Nicolas Wishman (1802- 1865), né à Séville, d’une famille anglaise et irlandaise ; élevé au collège catholique d’Ushaw à Londres, puis, de 1818 à 1820, au collège anglais de Rome, où il fut ordonné prêtre. Après dix années d’études et de ministère à Rome, il était venu à Londres, où il donna durant l’hiver 1836, avec un très grand succès, des conférences sur l’Eglise catholique. L’étendue de son esprit, une formation à la fois anglaise et romaine, le préparaient à dénouer des situations difficiles. Rentré définitivement en Angleterre en 18^0, il devint en 1850, lors du rétablissement de la hiérarchie romaine, cardinal archevêque de Westminster. Manning lui succéda en 1865. La sécession des grands convertis devait provoquer la stupeur et parfois la colère dans les milieux anglicans. Le rétablissement delà hiérarchie romaine par Pie IX donna le signal d’une extrême effervescence ; le premier ministre John Russell ne se fit pas faute d’attiser la flamme en dénonçant une agression italienne dans le domaine de la couronne d’Angleterre. Il fallut tout le savoir-faire de Wiseman pour calmer les esprits et les amener peu à peu à une vue plus exacte des choses. L’arricre-garde des tractariens, demeurée anglicane, se ralliait autour de V. B I’uskv, noble caractère, mais intelligence fermée à la conception catholiquede l’Eglise. En 1865, il publia :

Tome IV.

L’Eglise d’Angleterre, partie de V Eglise une, sainte, catholique du Christ, et un moyen de rétablir l’unité visible. In Eirenicon, dans une lettre à l’auteur de

« Christian Year » ; écrit très agressif, malgré son

titre, où l’auteur, sous forme de lettre à son ami Keble, ressasse les vieux griefs anglicans, notamment contre la dévotion à la sainte Vierge, et se montre disposé à traiter, avec l’Eglise romaine, de puissance à puissance.

Le Concile du Vatican et la définition de l’infaillibilité papale déchaînèrent une autre tempête. Signalons les violences de Gladstone : Rome and the newest fashions in Religion. Three Tracts. The Vatican decrees. Vaticanism. Speeches of the Pope. London, 1875.

Le mouvement ritualiste, qui devait confluer avec le mouvement tractarien versune restauration catholique, naquit un peu plus tard, non plus à Oxford, mais surtout à Cambridge, où fut fondée en 183q la Cambridge Camden Society ; destinée à promouvoir l’étudede l’art chrétien et desantiquitéschrétiennes, spécialement en ce qui concerne l’architecture, l’arrangement et la décoration des églises. Dans les années qui suivirent, on vit apparaître çà et là des autels de pierre, l’usage des cierges pour le service divin, du surplis pour la prédication, et d’autres pratiques liturgiques familières à l’Eglise romaine. Les protestations.nemanquèrentpas. ALondres, en 1850, le Rev. Bennbtt se voyait admonesté sévèrement par l’évêque Blomfield pour le ritualisme prononcé de son église S. Barnabas, et contraint de démissionner. Mais son successeur persévérait dans la même voie, plaidait devant le nouvel évêque de Londres, Tait, et l’archevêque de Canlorbéry, et obtenait gain de cause. En 1855 se fondent la Société de la Sainte Croix et la Confrérie du Saint Sacrement, pour le développement du culte eucharistique. A partir de 185t), le mouvement ritualiste trouve un appui très ferme dans l’English C hure h Union, qui rallie beaucoup d’éléments High Ckurch. Vers 1866 apparaissent dans les églises la chasuble et les autres ornements du culte eucharistique, avec tout le cérémonial delà messe. Les ritualistes prétendent bien ne pas contrevenir au Prayer Boolc, dont la « rubrique des Ornements » autorise les ornements usités en Angleterre la deuxième année du roi Edouard VI. La confession auriculaire et d’autres pratiques romaines sont d’usage courant dans les églises ritualistes. Telle croyance reniée par l’anglicanisme primitif, comme l’efficacité de la prière pour les morts et les droits de la sainte Vierge à nos hommages, reparaît dans la liturgie. Le culte, célébré avec une grande splendeur, qui contraste avec la froideur du rituel anglican, attire un public nombreux et manifestement vient au devant d’un besoin. Les ritualistes se lancent dans l’apostolat populaire ; très particulièrement dans les quartiers déshérités de YEast End londonien, ils éveillent des âmes que jamais aucune influence religieuse n’avaient touchées. Les noms de quelques-uns de ces apôtres populaires, tels que le Rev. Mackonociiib (1825-1887), parviennent à une grande notoriété. Durant le choléra de 1866, les religieuses ritualistes se dévouent généreusement à soulager toutes les misères. Les anciens tractariens sont touchés par cette intensité de vie chrétienne et par des aspirations manifestes vers leur propre idéal. En 186G, Pusey adhère à l’English Church Union, et lui apporte le renfort de sa doctrine. Il la soutiendra énergiquement dans tou’es ses épreuves. Sous l’impulsion de Lord Halifax, qui la présidera pendant un demi siècle, l’English Church Union ne cessera de poursuivre une œuvre de restauration chrétienne et d’union.

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