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REFORME

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ville la discipline ecclésiastique. Le Conseil accepta tout. Les Registres notent, à la date du 1 3 septembre, que « M 1’Jehan Calvin, ministre évangélique… est arryvé d’Estrabourg » et qu’il a été « resoluz de le prier que entièrement il doybje demore iey, … aussy resoluz que l’on envoyé querre sa femme et son MWHIQ1

Calvin en elîet s’était marié, à la fin d’août i~>î<>, avec la veuve d’un anabaptiste qu’il avait converti. Cette femme se nommait Idelette de Bure. Elle avait, de son premier mariage, une tille qui donna plus tard beaucoup d’ennui à Calvin, par les scandales qu’elle provoqua. Calvin eut aussi un tils qui mourut en bas âge. Il semble bien que Calvin ait su déployer, dans l’intimité de son intérieur, une certaine tendresse de cœur, qui étonne de la part d’un homme si dur au dehors, mais que les historiens protestants, Lang, Doumergue surtout, ont célébrée avec un véritable enthousiasme.

A partir de i">41. Calvin fut le maître de « Genève, non pas, à vrai dire, le maître incontesté, car il eut des adversaires acharnés et implacables, mais du moins le maître qui commande et se fait obéir.

Sa situation est assez étrange. Il n’est à Genève qu’un étranger. Il s’est offert d’ê ire toujours « serviteur de Genève ». Ce serviteur est logé par la ville, dans une maison simplement meubléeavec un beau jardin, rue des Chanoines ; il reçoit un traitement de cinq cents florins d’or, — le double de ce qu’on donne aux autres prédicants. Il ne deviendra hourgeoisde Genève, qu’en iô.Vj. « Il n’était, au point de vue civique, qu’un hôte, et cela lui plaisait sans doute de n’être apparemment qu’un néant, un néant devant Genève, comme un néant devant Dieu. Mais il revendiqua et sut obtenir pour Dieu des prérogatives légales ; et, dès lors qu’elles furent reconnues, ce fut lui qui parla au nom de Dieu, et son néant devint tyrannie. » (Gborgbs Goyxii, Une Ville-Eglise

I, 40-40"

Calvin se regarde en effet, quoique indigne, comme un nouveau Moïse. Il a le même genre de confiance en soi-même que nous avons trouve dans un Luther. Il s’imagine que par sa bouche c’est Dieu même qui parle. Il est convaincu que seule son interprétation de la Bible est correcte.

Il s’accorde à lui-même cette infaillibilité qu’il refuse à l’Eglise catholique. Il fait profession cependant de se délier de lui-même, de son talent, de sa raison. Il écrit à M. d’Aubelerre, en mai 1553 : « Je confesse que ce seroit trop grande présomption à moy de me lier à mon sens propre, cuidant avoir meilleur jugement que les aultres. » Mais il ajoute aussitôt : « Puisque Dieu m’a jaict la grâce de me déclairer ce qui bon ou mauvais, il fault que je me règle à cesf/> mesure. » Avec une pareille assurance, rien ne l’émeut, rien ne l’arrête. Il ne songe qu’à l’honneur de Dieu, il commande, il menace, il enseigne, il impose ses idées, ses manières de voir, ses volontés, tout cela au nom d’un livre, dont il connaît tous les secrets, dont il sait traduire toutes les intentions : la Sainte- flible. M. Choisy a pu ap peler très justement le régimequ’il instituée Genève une Hibïiocratie.

Quels étaient les rouages principaux de ce gouvernement biblique ?

IX. L’Etat puritain à Genève. — Dès l’époque où il avait commencé à s’éloigner de l’Eglise catholique, Calvin avait été frappé de trois choses que l’on reprochait justement à la « Réforme luthérienne » : i* Elle n’avait pas amélioré les mœurs, tout au contraire, l’insistance que Luther avait mise à enseigner la. justification par la foi sans les

œuvres avait amené un relâchement moral que Luther lui-même déplorait amèrement ; a* Elle avait assujetti l’Eglise au pouvoir civil, d’une façon dangereuse et humiliante : 3* l’ar contre-coup, certaines sectes, — les Anabaptistes surtout, — avaient montré à l’égard des autorités civiles un esprit d’indépendance et d’insoumission qui faisait redouter les plus graves désordres sociaux.

Très préocupé de ces critiques adressées à la Réforme, Calvin organise l’Eglise de Genève, de façon à répondre victorieusement aux attaques de ses adversaires.

Il maintient le dogme de la justification par la foi seule. Mais il rétablit la nécessité des œuvres. On a eu tort de le croire original sur ce point. Il ne fait que copier Luther. Comme lui, il déclare que toutes les œuvres « que nous faisons de notre propre nature sont vicieuses, et par conséquent ne peuvent plaire à Dieu », que Dieu nous justifie par la foi,

« sans aucune considération de nos œuvres », que

ces œuvres ne deviennent jamais des mérites même chez les justes, mais qu’elles sont nécessaires pourtant afin de montrer que nous avons bien la vraie foi. Comme Luther, Calvin est convaincu que le peuple ne peut pas être dirigé par l’Evangile pur, mais qu’il doit être « pressé corporellement » et

« contraint par les lois et le glaive » (voir ci dessus

l’aveu de Luther à son ami Spalatin, lettre du 7 janvier 1627, Endrrs, VI, 6).

Mais Calvin profite des expériences faites par Luther. Il va droit au but. Il a sa constitution toute prête. Il veut que l’Eglise et l’Etat marchent de pair. L’Etat accepte les ministres, mais les ministres imposent à l’Etat les volontés divines. C’est Dieu qui commande par ses ministres, et l’Etat n’a d’autre but, d’autre raison d’être que de faire observer la loi de Dieu par tous les sujets. La distinction du pouvoir spirituel et du pouvoir temporel, précieuse conquête de l’Evangile, disparait avec Calvin, comme avec Luther. On rétrograde jusqu’à l’Ancien Testament. L’Etat puritain ne connaît guère que la loi de crainte. Il ignore ou il oublie la loi d’amour. Jamais le joug de la religion n’a été plus oppressif ni plus importun. le calvinisme a retardé l’avènement de la liberté dépensée, t du naturalisme, mais au détriment de la liberté tout court et des aspirations légitimes de la nature.

Les Ordonnances ecclésiastiques, proposées par Calvin dès le 13 sept. 1541. furent soumises, d’après son désir, dès le 16, aux six commissaires nommés par le Conseil, et approuvées en Conseil général

« sans contradiction » le dimanche aonov. 154 1.

En voici l’analyse :

« Il y aquatre sortes d’offices, que Nostre Seigneur

ainsiilué pour le gouvernement de son Eglise : 1 " les nasleurs, puis les docteurs, après les anciens, 4e le- ; diacres ». — 1 » Les pasteurs ont pour office d’annoncer la Parole de Dieu pour endoctriner, admonester, exhorter et reprendre tant en publia comme en particulier, administrer les sacramans et faire les correct ons fraternelles avec les anciens et comys », … « nul ne se’loibt ingérer en cest office sans vacation ; en laquelle il fault considérer trois choses assavoir 1) l’examen, qui est le principal, après a) à qui il appartient de instituer les ministres, 3) quelle cérémonie ou façon de faire il est bon de garder à les introduire en l’office ».

L’examen des futurspasleurs porte sur la doctrine, l’aptitude à enseigner, sur la conduite privée et publique. Il est fait par le Consistoire.

L’institution se fait de la manière suivante : a Que les ministres eslisent premièrement oelluy qu’on doibvra mettre en l’office. Après, qu’on le