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REDEMPTION

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les arracher aux rêves du messianisme terrestre, pour les orienter peu à peu vers le mystère de la croix. Tout cela clé expliqué ci-dessus, art Jksus-Christ, t. 11, 1340-1352 Présentement, nous nous bornerons à rappeler les premiers et rapides coups de sonde jetés par le Maitre dan » lame des disciples, non pour les connaître, mais pour les découvrir à eux-mêmes. Trois épisodes (ixeront notre attention. a) Le discours du Seigneur avant la première missiondes disciples. Mi., x, 5-’|2 ; Me., vi, 7-13 ; Le., ix, i-5. D’après la place qu’il occupe dans les trois synoptiques, il ne paraît guère douteux que cet épisode appartient à la première période du ministère du Sauveur. Or le discours, tel qu’il est rapporté en saint Matthieu, se réfère, dans sa plus grande partie (15-’|2), à la On des temps ; on y trouve notamment une allusion expresse au retour glorieux du Seigneur, Ml., x, 23 : « Vous n’achèverez pas de parcourir les villes d’Israël, avant que vienne le Fils de l’homme. » Cette allusion à un retour du Fils de l’homme sous-entend la (in préalable de sa carrière terrestre. Il semble donc, à première vue, qu’on ait ici une allusion à la mort du Christ, allusion datant des premiers temps de son ministère. Néanmoins il faut reconnaître que cette partie du discours rapporté par saint Matthieu n’a point, en cet endroit, son pendant chez saint Marcnichez saint Luc ; on le trouve beaucoup plus tard, en Me., xiii, 9-1 3, Lc, xxi, 12-17. Ici, le parallélisme se borne à Ml., x, ô— 1 4 = Mc, vi, j- 1 3 = Lc, ix, i-5. Il y a apparence qu’en ce discours, comme en d’autres passages de son évangile, notamment dans le Sermon sur la montagne, l’évangélisle saint Matthieu a bloqué, dans un même contexte, des enseignements donnés par le Seigneur en divers temps, eten divers lieux. Dans ces conditions, l’épisode considéré n’offre pas un point d’appui entièrement sûr pour affirmer que le Seigneur commença de bonne heure à initier les disciples au mystère de sa Passion.

b) L’allégorie du départ de l’Epoux. —Cet épisode se lit dans les trois synoptiques, Mt„ ix, I-d = Mc., ii, 18 20 ; Lc, v, 33-35. Il est sûrement antérieur à la confession de Pierre ; sûrement aussi on y trouve une allusion — voilée — au temps où les disciples ne jouiront plus de la présence du Maitre, qui se désigne lui-même sous les traits de l’Epoux. Voir t. I, 14ao. Donc l’intention de préparer leurs esprits aux douleurs de la séparation est manifeste.

c) le signe deJonas ; le signe du Temple. — Autre allusion, toutau moinsprobable, à la mort du Christ, à travers le miracle de sa résurrection. Elle se lit, Ml., xii, 4°, o « qui donne lieu de l’attribuer aux premiers temps du ministère de Jésus. « Comme Jonas fut dans le ventre du poisson trois jours et trois nuits, ainsi le Fils de l’homme sera-t-il dans le sein de la terre trois jours et trois nuits. » C.’e-t, sinon la même prédietion, tout au moins une prédiction semblable, qui devait être reprochée au Seigneur dans sa passion et que rapporte le quatrième évangile, /<>., ii, 19-21 : « Jésus répondit aux Juifs : « Défi truisez ce temple, et je le relèverai en trois jours. » Les Juifs dirent : « On a mis quarante-six ans à 1 construire ce temple, et tu le rebâtiras en trois

« jours ? » Mais il parlait du templede son corps. » —

Les difficultés d’interprétation que soulèvent ces signes ont déjà été examinées, art. Jihcs-Christ,

f Soj-iS fa

En résumé, l’annonce de la Rédemption par la mort de Jésus se fit, dans le » derniers temps de sa vie, assez fréquente et assez claire pour demeurer orofondément imprimée dans l’âme de ses disciples. Il semble avoir jusqoe-là ménagé leur faiblesse ; mais, à défaut de la pleine révélation, que leur foi

imparfaite ne pouvait encore porter, il leur donnait dans l’occasion, des lumières qui peu à peu les pénétraient et dont nous retrouvons la trace à certaines pages de l’Evangile.

§ 2. — Eiûtrbs de saint Paul

On a vu ci-dessus, art. Paul (saint) bt Paulinismb, col. 1628-9, <ï ue la théologie de l’Apôtre est essentiellement une sotériologie. Nous devons nécessairement en marquer ici les grandes lignes. El d’abord, le retour de certains termes techniques est significatif. On notera : ’Airoj.Ozpu-ni : Ilom., iii, 24 ; viii, 23 ; I Cor., i, 30 ; Eph., 1, 7.14 ; iv, 30 ; Col., 1, il, ; Heb., ix, 15 ; xi, 35.

Aùt^wciç : Heb., ix, 12.’AnuvTpo-j : 1 Tint., 11, 6,

harptk : Tit., 11, 14.

De plus : ’Ayo^àÇu : I Cor., ’yi, 20 ; vii, 23 ; Vtmf$pêÇm, Gal., iii, 13 ; iv,.">.

Il y a des nuances de sens dans l’acception de ces mots ; mais l’influence du sens originel demeure visible, et tout ce vocabulaire est pénétré par l’idée de justice.

La première justice dont il évoque l’idée est celle de justice commutative, parfois soulignée avec une insistance significative, ainsi I Cor., vl, 20 : ’HyqufskRs

/à/9 n/rffc : cf. VII, 23.

D’ailleurs la pensée de l’Apôtre dépasse, de loin, cette justice un peu terre à terre. Pour avoir la clef de son vocabulaire, il faut nécessairement prendre en considération la justice au sens biblique, attribut divin essentiellement bienfaisant, dans lequel s’harmonisent la fidélité aux promesses, la libéralité, la miséricorde à l’égard du repentir. L’éducation rabbinique de saint Paul avait profondément imprimé cette notion dans son esprit ; il n’éprouvera pas le besoin d’y renoncer, mais l’orientera vers les enseignements du christianisme. Cette cenceplion biblique est très répandue dans tout l’AT. Citons par exemple Ps., xxx, 2 ; xlvii, 10-12 ; l, 16 ; lxviii, 28 ; xr.vn, 2 ; cxviii, 4° ; cxlii, 1. Il ; Is., xxx, 18 ; 1er.,

XXXIII, 1’|-l6.

Œuvre du Dieu juste qui, de pécheurs, fait des justes : telle est par essence la Rédemption. D’après cette idée fondamentale, saint Paul en explique le principe, la loi, la portée religieuse.

a) Le principe de la Rédemption. — Saint Paul s’empare dece texte du prophète Ilabacue, 11, 4 : « Le juste vivra par sa foi », et l’applique au chrétien, Rom., 1, 17 : « La justice de Dieu, manifestée dans l’Evangile, est communiquée par la foi au croyant, salon qu’il est écrit : Le juste vivra de foi. » Cf. (inl., iii, 1 ; lleb., x, 38. Cette justification du fidèle découle immédiatement de la Rédemption. Rom., iii, 21-2^ :

« Maintenant, en dehors de la Loi de Moïse, la justice

de Dieu est apparue, appuyée snr le témoignage de la Loi et des Prophètes, justice de Dieu par la foi en Jésus-Christ, pour tous les croyants sans distinction. Car tous ont péché, ils sont exclus de la gloire de Dieu. Mais Dieu les justifie gratuitement par sa grâce, en vertu de la Rédemption par Jésns-Christ ». Les versets suivants montrent la justice de Diu à l’o’iivre pour faire des justes, Rom., iii, 25-20 : « Dieu a présenté le Christ comme victime propitiatoire par son sang au moyen de la foi, afin de manifester sa justice grâce nu pardon des fautes passées au jour de sa patience, afin [dis-je] de manifester sa justice dans- le temps présent, pour être (reconnu] juste et justifiant celui qui croit en Jésus. » Il n’est pastoujours facile de discerner dans le texte de l’Apôtre si la juslicede Dieu, dont il parle, est précisément l’attribut divin ou la participation de la justice divine