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PSAUMES

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No t’irrite pas au sujet des méchants,

Ne t in ligne pas & propos de ceux qui font le uni !.

Car, comme l’herbe, ils « eronl vite coupés,

Comme la verdure du gazon ils se dessécheront.(1.2)

Encore un peu de temps el le méchant n’est plus…

Mais les doux (les justes résignés) posséderont la terre

Ils goûteront les délices d’une paix profonde (10. 11).

Voilà la solution. Le bonheur Je » méchants icibas ne dure que très peu ; bien vite la mort ou autre accident y mettra lin. Au contraire, les justes, après une courte épreuve, jouiront d’un bonheur intarissable. C’est exactement le point de vue des amis de Job (voir par ex. Job, viii, 11-22 ; xv, ao-35 ; xviii, 5-ai ; xx, 4-a9).

Il y a du vrai dans cette doctrine ; il arrive maintes fois, surtout dans une société bien réglée ou aux inii’iirs antiques, que le méchant n’a pas de succès et que Dieuse l’ait sentir par des punitions exemplaires. Le Tsalmiste, d’ailleurs, se reporte à sa propre expérience :

J’ai été jeune, me voilà vieux ;

et je n’ai point vu le juste abandonné.

ni sa postérité mendiant son pain (ixxvii, 25).

Nous n’avons aucune raison pour refuser d’ajouter foi à cette expérience.

Mais l’expérience n’était pas toujours si belle. Tournons la page et nous trouverons, au Ps. xxxix, l’auteur sacré qui soupire sous le poids de la souffrance, chagriné à la vue de la prospérité des méchants. Il se tait sur cet étrange état des choses, pour ne pas offenser Dieu et scandaliser le prochain ; il se résigne, il veut êtrelidèleà Dieu quand même ; sur l’au-delà il ne compte pas, il demande seulement un peu de répit en cette vie si courte ! Dévouement vraiment digne de notre admiration 1 C’est le sentiment de Job (voir, par ex., vi. vu. x).

Au Ps. xlix, assurément d’un autre auteur (titre

« Fils deCoré »), la question est plus nettement posée

et un éclat de lumière, une vraie révélation (v. 5), découvre une solution nouvelle, bien supérieure aux précédentes. Aussi le poème s’ouvre-t-ilpar une solennelle invitation atout le monded’entendre lagrande nouvelle. La voilà : les impies, les mauvaisjouisseurs, jamais ne pourront racheter leur àme du scheôl ; ils y resteront à tout jamais :

Leur ombre se consumera au scheôl sans autre

[demeure. Mais Dieu rachètera mon âme de la puissancedu scheôl, car il uie prendra avec lui (15-16).

L’opposition bien marquée avec le sort des impies qu : précède et le sens technique du mot prendre (luquli) employé déjà à propos de la translation d’Hénoch et d’Élie (Gen., v, il ; II Reg., 11, 10 ; comparez I Sam., x^ iii, a), montrent à l’évidence quedans les derniers mots il s’agit d’une vie de bonheur après la mort, vraie vie menée auprès de Dieu, loin de cette région désolée qu’est le scheôl. Voilà ce qu’espère pour lui-même le pieux poète ; voilà ce qu’il fait espérer à tout homme qui, comme lui, aura marché dans les voies de Dieu. Ici donc nous avons, à n’en pas douter, nettement affirmée la croyance au bonheur réservé aux justes dans l’autre vie. La formule est encore vague, imprécise ; mais le principe est posé, la justice souverainede Dieu est brillamment revendiquée, les destinées de l’homme s’éclairent d’un jour splendide.

Pareille conclusion, mais plus détaillée, dans le Ps., lxxiii (d’Asaph), où la mise en scène de la question est aussi plus poignante.

« J’étais sur le point de fléchir

dit le Psalmisle

mon pied a presque glissé. Car je m’indignais contre les impies, en voyant le bonheur des méchants (2 s.).

Le scandale estait comble, le pieux poète va presque succomber à La tentation ; car il ne comprend rien à ce mystère (<6). La dillicullé demeure, tant qu’il n’entre pas dans le secret de Dieu et ne prend pas garde au sort linal des méchants (17) Ils disparaissent ; plus de bonheur pour eux après la mort :

Mais je serai à jamais avec toi : Tu m’as saisi la main droite,

par Ion conseil tu me condu’ras, et tu me recevras ensuite dans la gloire (23 ss.).

Le deux derniers mots du texte (kabod et laqah) montrent bien qu’il s’agit ici de la vie d’outretombe’. Aussi le bonheur d’être toujours avec Dieu est-il le plus grand bien de l’homme (a5-a8) ; c’est là la récompense de la vertu, et la pensée de ce grand bien soulage les douleurs de la vie.

A la même espérance d’un éternel bonheur auprès de Dieu, s’élève aussi lePs., xvi (de David celui-là), mais par une voie plus directe ; en considérant non l’imparfaite justice de ce monde, mais la dignité même de la faveur dont Dieu entoure ses dévots.

Iahvé est la part de mon héritage et de ma coupe… oui, un splendide héritage m’est échu (5.6).

Un tel héritage ne pourrait être passager, restreint à la courte existence d’ici-bas ; éternel dans son objet, il doit être éternel dans sa possession ; ce lien sacré qui unit l’élu à Dieu est de soi indissoluble. Aussi le poète s’écrie-t-il :

Tu ne livreras pas mon àme au séjour des morts, Tu ne permettras pas que celui qui t’aime voie la

[corruption. Tu me feras connaître les sentiers de la vie ; il y a plénitude de joie devant ta face, des délices éternelles dans ta droite (10).

c’est-à-dire : à rester toujours près de Toi, en ta présence. L’expressiondébordeicil’espérance ; ou mieux, la pensée dépasse l’étroit horizon d’une àme humaine. Il ne restera pas à jamais proie de la corruption du sépulcre : voilà ce que pouvait raisonnablement espérer David, ce qu il obtiendra dans la résurrection de la chair. Mais le vœu de ne pas voir la corruption aura son plein effet, en toute rigueur de termes, dans le Fils de David par excellence, dans le Messie. Les deux princes des Apôtres l’ont bien fait ressortir(^cf., 11, aa-3a ; xiii, 35 ss.).

Nous passons ainsi au messianisme dans les Psaumes. Mais il ne sera pas inutile de souligner encore ici l’extrême importance de deux principes, dont tout le Psautier est pénétré : la foi dans la Providence, et la conviction que le vrai bonheur de l’homme, icibas, n’est pas dans la jouissance des biens matériels, mais dans l’union avec Dieu.

3. Le Messie. — Prise dans toute son ampleur, la doctrine du messianisme comprend trois aspects ou trois étapes : l’universalité de la religion d’Israël, l’eschatologie sociale, et la personnalité du Messie. La première considère le but principal de l’activité messianique, la seconde décrit les actes qui préparent et ouvrent l’en ; messianique, la troisième enfin considère l’organe ou le ministre du salut messianique.

Esquissons brièvement les deux premiers points, tels qu’il s se présentent à nous dans les Psaumes, pour nous arrêter davantage sut la personne du Messie.

A) Univtrsalisme. — Les prophètes d’Israël n’avaient

1. Voir plus haut sou » B) et C). I-e mot kabod (= j Il ids substance, magnificence) est bien ici l’opposé de rtphalm (= ombres flou- - : gne les habitants de scheôl.