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PRÉDESTINATION
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l.icet ordo, de quo agitur, decretis et electionibus Dei sit tcintum extrinsecus, eisque solum attribuatar per denomiriationein extrinsecam ah ordine obiectorum circa quæ versantur, non est tamen dieendum electionem ad gloriam simpliciter esse ante vel posl electionem ad gratiam, .<<</ hac distinctione utendum quid ordine intentionis et causalitatis finalis, electio ad gloriam prior est élections ad gratinai, et hæc illa posterior, quatenus gratin est effectus finalis gloriae. Ordine vero executionis et eausalitatis materialis, seumeritoriae, contra electio ad gratiam est prior electione ad gioriam. Ratio est, quia tah’in ordinem in decretis /)ei const tnere debemus, de gratia et gloria prædestinandis darula, qualem hæ inter se a parte rei habenl : at a parte rei, gloria, in génère eausæ finalis, prior est gratin : et hæc contra, in génère eausæ materialis et meritoriae, gloria prior est.
A ne considérer que la prédestination proprement dite, cette distinction peut paraître secondaire. Son importance tient à son contrecoup dans la doctrine de la réprobation. Dans la première édition de ce Dictionnaire, Mgr Pkkriot a cru devoir la remettre en honneur, non sans exagérer quelque peu l’oubli où l’auraient laissée les théologiens ; col. a583 :
Pourquoi les théologiens, qui ont nettement distinguo les deux ordres d’intention et d exécution, qui ont établi avec saint Thomas ce principe, que les choses ont dans les décrets divins le mémo ordre qu’entre elles, qui ont remarqué avec une évidente vérité que l’ordre d’exécution est l’inverse de l’ordre d’intention, ne sont ils pas allés avec saint Thomas jusqu’à la conclusion que suggéraient ces prémisses ? Pourquoi n’ont-ils pas reconnu, d’un commun accord, que, si l’on considère l’ordre de la lin. Dieu prédestine premièrement à la gloire et seulement ensuite à la grâce et au mérite ; que, si l’on considère l’ordre de la cause méritoire, Dieu ne prédestine à la gloire qu’en prévision des mérites ? Pourquoi chacun s’est-il cantonné dans l’une des deux affirmations, combattant l’autre comme si olle était fausse ?
Effectivement, les controverses sur la prédestination ante ou post prævisa mérita ne semblent pas avoir toute l’importance que donnerait parfois à croire l’acharnement des parties ; et l’on a pu combattre pour des mots, alors qu’on était d’accord sur le fond des chose- ; . Le parallélisme avec la sentence absolue de réprobation, qui ne se conçoit pas sinon post prævisa denier di, a pu induire des théologiens à revendiquer le point de vue de la prédestination post prævisa mérita. Mais ici, il convient, croyons-nous, d’observer deux choses. D’abord, qu’à proprement parler, il n’y a point parallélisme, ou du moins pas prrité, entre prédestination et réprobation. Car la glorilication de la créature raisonnable est le terme d’un dessein positif de Dieu ; sa réprobation n’est que l’effet d’une déchéance, consécutive à 1’inûdélité de la créature. En second lieu, toute prédestination est formellement dessein de Dieu, c’est-à-dire qu’elle appartient proprement à l’ordre de l’intention, avant de procéder à l’exécution. Et ceci recommanderait le point de vue de la prédestination ante prævisa mérita, non seulement pour la prédestination totale, ce qui n’est point controversé, mais encore pour la simple prédestination à la gloire. Car un dessein ne va pas sans une certaine priorité de la fin sur les moyens.
Mais la prédestination des uns ante prævisa opéra a pour corollaire une certaine réprobationdes autres ante prævisa opéra. Et ici la tâche de l’apologiste apparaît délicate. Aussi iinporle-t-il de marquer aussi exactement que possible la frontière entre la doctrine catholique et les systèmes des théologiens.
La doctrine calviniste de la réprobation positive
antécédente, excluant a priori certains hommes du salut éternel, est simplement hérétique. Il n’y a place dans le domaine catholique que pour une r^orobation négative antécédente, qui, sans accorder à tous le bienfait d’une prédestination positive, ne prononce « priori contre les non-privilégiés aucune exclusion.
Or nous rencontrons deux conceptions fort dissemblables, d’après la distinction des termes par rapport auxquels la réprobation négative est dite antécédente. D’une part, la conception bannésienne d’une réprobation négative antécédente à la considération de lajustice divine vindicative, qui demande à être glorifiée, aussi bien que la miséricorde. D’autre part, la conception suarésienne d’une réprobation négative antécédente à la considération du péché.
Selon la conception bannésienne, les réprouvés sont purement et simplement sacrifiés à la glorification d’un attribut divin, et conséquemment livrés à leur propre démérite. Et sans doute leur démérite leur demeure imputable ; aussi leur destinée n’a-t-elle rien qui répugne absolument, du point de vue d’une justice rigoureuse.
Selon la conception suarésienne, les réprouvés sont simplement livrés à leur démérite, et conséquemment châtiés, pour l’honneur de la justice divine. L’amour antécédent de Dieu, qui s’est reposé sur d’autres âmes pour les extraire de la massa peccati et marquer leur carrière du signe des prédestinés, ne s’est point reposé sur elles avec la même complaisance. Il les a prévenues de moindres grâces ou les a soutenues de secours moins persévérants. Néanmoins il ne leur a rien refusé qui leur fût rigoureusement dû. Ici encore la justice est sauve.
Malgré les raisons efficaces que l’on apporte pour mettre hors de cause, dans l’un et l’autre système, lajustice divine, beaucoup de théologiens ont peine à se reposer dans la pensée d’un traitement aussi rigoureux. Ce sont les théologiens de la prédestination post prævisa opéra, qui s’attachent à la considération des avances faites par la divine miséricorde à tous les hommes sans exception et ne veulent admettre aucune réprobation antécédente même négative, mais seulement une réprobation conséquente à la prévision des démérites. Cette conception de Lessius et de saint François de Sales est assez fondée dans l’Ecriture et la Tradition pour qu’il soit loisible à chacun de s’y reposer. Et l’on sera beaucoup plus à l’aise pour faire l’apologie de la justice divine.
Donc la réprobation négative antécédente, sous quelque forme qu’on la présente, n’est qu’un système théologique. Si l’on demande ce qu’en pense l’Ange de l’Ecole, nous croyons devoir répondre :
i) Saint Thomas est sûrement contraire à la réprobation antécédente entendue au sens bannésien. Il est bien vrai qu’il assigne comme fin à la réprobation des pécheurs la glorification de la justice divine vindicative, la, q. a3, a. 5 ad 3 m : Volait Deus in hominibus quantum ad aliquos, quos prædestinat, suant repræsentare bonitatem per modum misericordiae, parcendo, et quantum ad aliquos, quos reprobat, per modum iuslitiae, puniendo. Et hæc est ratio quare Deus quosdam eligit et quosdam reprobat. Mais la manifestation de la justice divine ^ indicative n’est pas un terme par rapport auquel saint Thomas parle de volonté divine antécédente ; toutes les fois qu’il parle de volonté antécédente, en cette matière, il le fait, avec saint Jean Damascène, par rapport au fait humain du péché, selon le principe général posé la, q. 19, a. 6 ad i m. Entre le commentaire de B a ûcz et celui de Cajetan, on optera sûre-