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MARIE, MERE DE DIEU

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pratiquer.il, ii, P. L., Wl, 208-iii. Ce thème lui était cher ; il le reprendra quinze ans plus lard (892), à l’intention de la jeune Anibrosia, qui venait de consacrer à Dieu sa virginité ; el il saisira l’occasion de llélrir l’hérésie de Bonosb, renouvelée d’Helvidius. Marie a levé l’étendard de la virginité chrétienne ; son exemple attire au Christ d’innombrables vierges. Et cependant il s’est trouvé des hommes pour nier qu’elle ait persévéré dans la virginité. Ambroise a longtemps préféré s’en taire ; mais quand un évêque (Bonose était évêque de Sardique) se fait complice de telles allégations, il faut nécessairement le flétrir. La réponse qu’il oppose à l’hérétique, moins poussée que celle de saint Jérôme à Helvidius, en reproduit les principaux traits. A propos du doute de Joseph, il esquisse un parallèle entre la résurrection du Christ et sa conception de la Vierge. La résurrection du Christ devait remplir de stupeur les anges (/’5. xxiii, 7-10). Et pourtant ce miracle n’était pas sans précédent scripturaire (1Il Heg., XVII, 22) : le lils de la veuve de Sarepta s’était levé vivant, à l’appel d’EIie. La conception d’une vierge est un miracle sans précédent (IV Heg., IV, i-j). Combien légitime donc l’étonneinent de Joseph ; De institutione virginis, v, 32-^0, P. L., Wl, 3 1 3-3 16. — Ambroise montre Marie, debout au pied de la croix, intrépide quand les hommes ont fui, prête à unir le sacriûce de sa vie à celui de son Fils, ibid., VII, 49, P- 318 G. Il devance saint Jérôme dans l’application à Marie de l’oracle d’Ezéchiel sur la porte orientale du temple, que seul le Seigneur a franchie(^3., xLiv, 2), et interprète cet oracle au sens le plus strict : la naissance du Seigneur ne porta nulle atteinte à la virginité de sa mère, viii, 52, p. 3ao A. — Voir ci-dessus, col. 124.

La spéculation de saint Augustin enrichit la doctrine mariale d’aperçus nouveaux et profonds. Non content de lutter, aux côtés de saint Jérôme, contre les hérésies d’Helvidius et de Jovinieii, il précise et pousse avec vigueur des idées seulement indiquées avant lui, touchant I9 rôle de Marie dans la Sainte Famille et dans l’Eglise, et touchant sa sainteté personnelle.

Augustin s’appuie sur l’Evangile pour revendiquer expressément, comme dû à Joseph, le titre d’époux de Marie ; d’autant qu’il trouve réalisés dans leur union les trois biens essentiels du mariage ; à savoir : 1° la foi conjugale, gardée inviolablement ; a" la postérité, car la protection et l’éducation du Fils de Marie était, dans la pensée divine, la raison d’être de la Sainte Famille ; 3’le sacrement, car cette union fut indissoluble, comme l’union du Christ et de son Eglise, figurée dans le mariage humain (Eph., v, 32). De nupliis et concupiscentia, 1, xi, 12, P. L., XLIV, 421 ; Contra lalianam Pelagianum, V, XII, 46. il’id., 810.

Par ailleurs, il insiste à maintes reprises sur la perpétuelle virginité de Marie ante partum, in partii, post partum. Sermo cLxxxvi (In Natali Domini, m), I, P. L., XXXVIII, 999 :

… Le Créateur invisible s’est fait visible pour nou* ; de ses entrailles fécondes, la vierg-e mère l’a mis au monde, sans détriment de sa virginité. Vierge dans la conception, vierge dans l’enfantement, vierge enceinte^ vierge mère, perpétuellement vierge. liorame, pourquoi rétonner ? Dieu devait naître ainsi, dès lors qu’il se faisait homme. Telle il lit celle dont il devait être fait…

Sermo clxxkviii (In Natali Domini, v), 4, P, /,., XXXVIII, lou/, :

Célébrons avec joie le jour qui vit naître de Marie le Sauveur, d une femme mariée TAuteur du mariage, d’une vierge le Roi des vierges ; confiée à un époux, elle devint mère sans époux, vierge avant le mariage, vierge dans

le mariage, vierge dans renfantemcnt, vierge dans l’allaitement. Par sa naissance, le Fils tout puissant n’a point ravi la virginité à la sainte Mère qu’il avait choisie pour naître d’elle. C’est un bien que la fécondité du mariage ; c’est un plus grand bien que l’intégrité de la virginité. L’homme Christ, pouvant donner l’un et l’autre (car il est à lu fois homme et Dieu), devait, en donnant à sa mère le bien cher aux époux, lui laisser le plus grand bien que les vierges préfèrent à la maternité. Aussi la sainte Eglise vierge célêbre-t-elle aujourd’hui l’enfantement de la Vierge. A elle s’adressent les paroles de l’Àpotre : Je vous ai destinée, vierge chaste^ à un seul époux, le Christ. Où trouver la vierge chaste, parmi une si grande multitude de l’un et de l’autre sexe, parmi non seulement tant d’t’ufantg et de vierges, maïs tant d’époux, tant de pères et de mères.’Où la trouver, dis-je, cette vierge chaste, sinon dans l’intégrité de la foi, de l’espérance et de la charité ? Voulant donc faire la virginité dans le cœur de l’Kglise, le Christ commença par la garder dans le cœur de Marie. Dans les mariages humains, une femme est livrée à un époux, afin de n’être plus vierge ; l’Eglise ne pourrait être vierge si elle n’avait trouvé pour époux le l’ils de la Vierge.

Mère du Christ selon la chair et des chrétiens selon l’esprit, Marie associe d’une façon unique aux gloires de la virginité cellesde la maternité. De sancta virginitate^ vi, P, /,., XL, 899 :

Seule entre les femmes, Marie est, non seulement d’esprit mais de corps, à la fois mère et vierge. Desprit, elle est mère, non pas sans doute de notre Chef et Sauveur, de qui plutôt elle est née selon l’esprit, car tous ceux qui croient en lui — et elle est du nombre — méritent d’être appelés fils de l’Epoux ; mais bien de nous, qui sommes ses membres ; car elle coopéi-a, par sa charité, à la naissance des fidèles dans l’Eglise, des membres de ce Chef. De corps, elle est mère de notre Chef même. Il fallait que, par un insigæ miracle, notre Chef naquît selon la chair d’une vierge, pour indiquer que ses membres naîtraient, selon l’esprit, de l’Eglise vierge. Ainsi Marie est-elle, d’esprit et de corps, mère et vierge ; mère du Christ et vierge du Christ.

Dans le De natnra et gratia, qui appartient au début de la controverse pélagienne (4 15), Augustin combat l’assertion de Pelage, d’après laquelle il y aurait ici-bas des hommes sans péché. Pelage a cité de saints personnages de PAncien Testament : Abel, Enoch, Melchisédech, Abraham, Isaac, Jacob…, Joseph époux de Marie, Jean (le précurseur). Outre les hommes, des femmes : Debbora, Anne mère de Samuel, Judith, Esther. Anne tille de Phanuel, Elisabeth, enlin la mère du Seigneur, « qu’on doit, dit-il, déclarer exempte de péché ». Augustin commence par mettre hors de cause la Sainte Vierge Marie, au sujet de laquelle l’honneur du Seigneur ne permet pas de soulever la question du péché ; car Jusqu’où a pu s’étendre la grâce particulière accordée, pour triompher du péché, à celle qui devait concevoir et enfanter le Seigneur entièrement exempt de péché ? Donc, Marie étant mise hors de cause, si l’on interrogeait tous ces saints et toutes ces saintes et si on leur demandait ; « Etiez-voussans péché ? » Que répondraient-ils ? Ce que répond Pelage, ou bien ce que répond l apôlre saint Jean (I/o., i, 8) : a Si nous prétendons être sans péché, nous nous trompons nous-mêmes, el la vérité n’est pas en nous » ? De natnra et ^ratia^ xxxvi, ^2, P. î-, XLIV, 267.

Ce n’est pas ici le lieu de discuter si l’alTirmation d’Auî^uslin s’étend à l’immaculée conception de Marie. Deux textes paraissent le suggérer, Contra liilianum Pelagianum V, xv, 5^, P.L., XLIV, 815 ; Opus iniperf. contra / « /(’armm, IV, cxxii, P./.., XLV, 1^18. (L’objection tirée de Op. imp.^ VI, xxii, 1553, ne porte pas.) Mais pour l’exemption aljsolue de toute faute actuelle, aucun doute n’est possible sur la pensée d’Augustin.

Voir : Ph. Fhiedrich, Die Mariologie des hl.