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PENITENCE

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en évidence, nous voyons qu’on le laisse à peine paraître. L’obscurité où il reste dans un traité sur la pénitence en général, ne prouve donc rien contre la réalité de son rôle ; etsaint Aiubroisenelui aurait-il pas accorde la mention discrèie que nous avons signalée II, ii, 86 et x, 91 ; Expos, eyang. sec. Luc, Vil, 224). sa présence se révélerait déjà dans les conûdences que les ànies font à Dieu de leurs blessures : le caractère oral qu’elles doivent avoir ne se comprend que si un tiers y est admis.

39. — Aussi bien, la sincérité qu’il y requiert ailleurs y suppose-t-elle aussi la présence du prêtre. Sa lettre à Siniplicianus (Ep. lxvu), malgré son allégorisme scripturaire, est à ce point de vue d’une netteté parfaite. Après avoir condamné, comme odieux au Seigneur, le pécheur qui prétend faire sa pénitence (). Sur un jiareil dissimulateur ( « in illo subdolo »), leur pouvoir de rémission n’a pas de prise (n’11). Aussi, conclut-il, le Seigneur ne saurait agfréer l’intervention du prêtre là où se produit la fraude et où fait défaut la sincérité dune bonne coni’ession {(i non sedulæ conf’essionis sinceritas », no lij).

Confession orale, confession capable d’en imposer au prêtre et de le tromper, mais qui doit être sincère pour lui permettre d’exercer avec fruit son pouvoir de rémission du jiéché, telle est donc la confession qu’exige l’évêque de Milan. Maintenant que nous avons appris de lui à la mieux discerner, peut-être la reconnaîtrons-nous plus aisément dans ce traité de la Pénitence où nous avons dit qu’au premier abord on avait quelque peine à la découvrir. En réalité, elle s’y trouve et à une place très apparente.

40. — A propos de la résurrection de Lazare, symbole du rappel du pécheur à la vie de la grâce, saint Ambroise nous l’y montre comme étant la condition même de cette résurrection spirituelle. Le rappel à la vie, c’est encore le Christ évidemment qui l’opère lui-même. Mais, comme il lui a plu de faire enlever par les hommes — quoiqu’il lui eût sufli d’un mot de sa bouche — la pierre qui fermait le tombeau de Bétlianie, il a voulu aussi que le fardeau de leurs fautes fût enlevé aux pécheurs par les ministres de l’Eglise — « par nous », écrit l’évêque. — C’est Lui ensuite qui les ressuscite vraiment et qui, après l’enlèvement de leurs liens, les fait sortir du tombeau. II, vii, 56, P. f.., XA’I, 511. Hominibus jiissil ut renioverent lapidem.. in iypo, quod nobis donaret ut levaremus delictoinm onera, moles quasdam leorum. J’ostram est onera removere ; illius est resuscitare, illius educere de seputcris exutos yiuculis [alias : erutos pondère]. a Voilà pourquoi, s’adressanl à celui qui gît dans les ténèbres de sa conscience, plongé dans l’ordure de ses péchés et comme dans une prison de criminels, le Christ, se rendant aux appels de l’Eglise, comme il lit à ceux des sœurs de Lazare, crie : Sors ; avoue ta faute, pour être justilié, car, faite de vive voix, la confession procure le salut » II, vir, 57). Si donc, reprend alors le saint évêque,

« si, répondant à cet appel du Christ, tu fais ta

confession, les portes de ta prison se briseront, et tous tes liens seront rompus, quelque corruption qui t’eût déjà envahi » (58).

41. — La place et l’importance ainsi attribuées par

saint Ambroise à la confession, nous allons d’ailleurs les retrouver les mêmes chez saint Augustin Lui aussi la met à la base du traitement à imposer aux diverses catégories de pécheurs. Manifestement, et endroit, tous, d’après lui, se confessent. Il distingue en effet deux classes : ceu.x que, malgré les péchés qu’ils confessent ( « qnamsis peccala confileanlur « ), on ne doit pas astreindre à la pénitence douloureuse et lamentable, et ceux pour qui il n’y a absolument pas de salut à attendre s’ils n’olTrent pas à Dieu le sacrilice d’un cœur contrit par la pénitence, i Ihs bene Iructolis ; — ce qui fait la diversité de gravité dans les péoliésl — probabitiler jndicari potest qui non sint cogendi ad pænilentinmluctuosani etiamen(aiiVem, yUAMVis peccata eTBA.NTUi, et quibus nulla oninino sperunda sit salus, nisi sacri/iciu/n iihiulerint Deo spirilum contribulutum per pucnitenliam » (De diyersis quæstionibus, i.KX’x.ni, 26, P. /.., XL, 18). Or ce discernement, en pratique, c’est évidemment la connaissance acquise par la confession de la nature des fautes commises qui permet de le faire ; si ceux qui peuvent être dispensés de la pénitence publique

— car c’est d’elle qu’il s’agit ici — se confessent, i> plus forte raison ceux pour qui elle est déclarée indispensable.

Or, cette confession, saint Augustin, comme saint Ambroise, la trouve figurée à la résurrection de Lazare. Comme Lazare recouvre la vie, sort du tombeau el est débarrassé de ses bandelettes, de même le pécheur recouvre la vie par le repentir ; mais c’est par la confession qu’il sort du tombeau et par l’absolution que ses liens sont rompus : « Cuni audis hominem pænitere peccaioruni suoruni, jam revixil ; cum audis /(OHii/iem coNFiTKNDO PROi’EBHE coNsciGNTi.vM, jam de sepulcro eductus est, sed nundum solutus est, Quando sohitur ? a quibus solvitur ? Quæ soheritis, inquit, ir. terra, erunt siiluta et in cælo… Eemissio peccatorun : solutio est » (Enarr. in ps., ci, 2, 3. P. /.., XXXVII. 1306).

L’application à la rémission des péchés de la résurrection de Lazare est d’ailleurs d’usage courant dans l’Eglise : voir déjà Origène, ci-dessus, n" 29 ; elle est destinée à y devenir classique : saint Grégoirr LE Grand (//oHi. in et’ang., /. II, Aom., xxvi, 4-7) la reproduira et certains scolastiques en tireront toute une théorie sur l’elTel propre de la contrition et du sacrement lui-même, mais déjà saint Augustin y revient fréquemment ; v. gr. Sernio lxvii, 2-3 ; xcviii, 6 ; ccxcv, 3 ; ccclii, 3-8 ; et c’est toujours pour y montrer la confession s’interposant entre l’appel de Dieu et l’absolution du prêtre. Comme l’appel du Christ à Lazare, l’appel de Dieu au pécheur lui rend la vie et lui donne la force de secouer le poids de ses mauvaises habitudes ; il le fait se lever : (( Difficile surgit, quem moles malæ consuetudinis premit. Sed tamen surgit : occulta gratia intus vivificatur ; surgit post vocem magnam. » Mais, comme Lazare, le pécheur, ainsi suscité par Dieu, sort du tombeau encore tout chargé de liens : » Processit, et adhuc ligaius est. » Or, sortir, pour lui, c’est confesser, manifester ses fautes secrètes ; « Quid est auiem foras prodire nisi quod occultum erat foras prodere ? Qui cnnfiletur, foras prodit ^(Sermo Lxvir, i-a, P. i., XXXVIII, ^34). Qui confitetur processit. Quare processisse di.rimus confitentem : ’Quia antequam conflteretur occultus erat ; cum autem confitetur procedit de tenebris adlucem » (In Jnan. Tract., xxii, 7, P. L., XXXV, iS^S). L’absolution ne vient qu’après : elle est lefaitdes minisires de l’Eglise, à qui le Christ a donné ce pouvoir de délier comme il prescrivit aux assistants d’enlever les bandelettes de Lazare : l’Isuh’erenturpeccata ejus, ministris hoc dixit Dominas : Solfiie illum, et sinite abire. Quid est, soUite et siniie abire ?