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PATRIE

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union sacrée. Elle n’exige pas que nos divergences aient abolies ou seulement dissimulées. Vouloir ue le feu et l’eau se réconcilient en se mélangeant t prennent les qualités l’un de l’autre, c’est pure bimère. Prétendre les associer en réduisant, dans bacun d’eux, au minimum les qualités qui les oppoent, c’estrendre leurassocialion décevante, illusoire , L complètement stérile. Il faut, au contraire, les nir avec toutes leurs qualités, l’eau très pure, le u très ardent, dans une organisation qui facilite ur accord et rende leur collaboration edicace : lors la machine marcliera vile et bien et longtemps, our le plus grand proUt de tous. Ainsi les Français de toutes les couleurs peuvent '. doivent s’associer à l’heure actuelle sur le terrain u patriotisme, sans rien særilier de leurs opinions i de leurs croyances, en les atlîrmanl au contraire, jur apporter plus eflicacement à l'œuvre commune - qui peut en elles y contribuer. Ce n’est pas la vergence qu’il faut chercher à faire disparaître par

; s sacrifices d’opinion que tout homme de cœur, 

aiment convaincu de ce qu’il professe, supportera 'ee d’autant plus de peine ou refusera avec d’autant us de violence que ses convictions seront plus prondes, plusvivaces, et sa personne, en conséquence, us respectable. Ce qu’il faut faire disparaître, c’est préjugé qui nous faisait voir un ennemi et, ir suite, un scélérat ou un imbécile, dans tout jmme qui ne pensait pas comme nous. La guerre détruit ce préjugé dans beaucoup d’esprits en leur iposant la constatation du contraire et celle de la alernité profonde qui, sous ces divergences, unit us les Français. Elle a porté un coup violenta l’esit de parti qui fut toujours le grand Iléau de notre ce. A nous, catholiques, de travailler de toutes nos rces pour que ce coup soit mortel. Car rien n est us opposé que l’esprit de parti à l’esprit de l’Evanle. C’est un esprit de lutte et de haine contré les ^rsonnes, alors que l’esprit de l’Evangile, irréduci)le sur la doctrine et hostile seulement aux gens de auvaise volonté et de mauvaise foi, est un esprit amour, de respect et de paix entre tous les hommes, us appelés par le même Père au même royaume ernel.

Les catholiques doivent donc entrer dans l’union icrée pour aider à l'étendre et à la parfaire ; mais 3 doivent y entrer drapeau déployé, sans abdiquer urs droits, sans diminuer ni taire leur doctrine, ins hostilité aveugle contre ceux que leur drapeau e rallie pas, mais aussi sans faire, à ceux dont tiostilité n’a pas désarmé et se dissimule, une ini"udente confiance. Le libéralisme et le sectarisme it l’un et l’autre fait leur temps parce qu’ils ont fait urs preuves de malfaisance, encore qu’ils n’aient .é bien souvent, dans nos milieux catholiques, que 1 déviation inconsciente d’intentions bonnes et roites ou l’illusion d’esprits ardents dupes de cœurs op généreux. L’expérience a prouvé que l’un de . ; s deux excès éloignait de notre cause trop d'âmes aturellement chrétiennes et qui l’auraient, sans

; la. d’abord aimée et, plus tard peut-être, servie ; 

indis que l’autre excès, loin d’apaiser ses ennemis, ugnientait leur assurance et la désarmait devant IX. L’expérience a prouvé aussi que l’hostilité du lus grand nombre contre la foi tenait à leurs préigés, à leurs ignorances et, surtout, à ce que, eux et ou-^. chacun cloîtré dans son parti, nous ne nous )nriaissions pas.

Lu guerre, la camaraderie du front, « l’amitié des anchées o, celle des régions envahies, le mélange t l’union, un peu partout, de gens de toutes les pin ions et de toutes les classes en face du péril ommun, dans la tâche nationale, ont changé ou fait

disparaître tout cela dans une assez large mesure. L’union sacrée est devenue possible et la France y a pris goùl parce que l’instinct de la conservation la lui fait sentir nécessaire, non seulement l’union sacrée de la guerre, qui lit trêve à nos discordes pour nous dresser tous ensemble contre les envahisseurs, mais l’union sacrée de la paix, qui doit nous associer tous ensemble pour le relèvement national. U faut qu’elle se maintienne et entre dans nos mœurs en restant bien comprise, en devenant mieux comprise encore.

Nos lecteurs se rendent compte, du reste, que si nous avons abordé ici cette question et tenté de la mettre au point, c’est qu’elle ne concerne pas seulement la France et les Français de igai. Elle peut se poser à toute époque et en tout pays ; elle doit toujours et partout être résolue de la même manière.

III. L’iNTERNATioNALisMB. — 1° luternatioruilisnie et aitti patriotisme. — On a généralement tendance à croire, quand on ne le croit pas tout à fait, que l’internationalisme engendre naturellement, sinon nécessairement, l’antipatriotisme, soit en lui-même, soit parce que, en devenant internationaliste, on cesserait de mettre le patriotisme au premier rang des vertus sociales et des sentiments humains. Si cette tendance prévaut, il en sera du mot « internationalisme » comme de plusieurs autres : détourné de son sens naturel, il Unira par ne plus désigner que des erreurs malfaisantes et celles-ci bénéficieront des dispositions sympathiques éveillées dès l’abord dans les esprits par les idées salutaires et justes que ce sens naturel évoque. Que l’on reproche à l’Eglise d'être, en doctrine ou en pratique, trop internationaliste ou pas assez, l’apologiste, en répondant à ce grief, fera donc timjours bien de commencer par quelques définitions précises.

Au sens propre du mot, l’internationalisme est un système qui pose comme théoriquement nécessaire et tend à réaliser pratiquement une entente entre des nations et des Etals en aussi grand nombre que possible, — intei nationes, — pour la satisfaction de leurs besoins, la conciliation de leurs intérêts et le règlement amiable de leurs différends. Loin de s’opposer au nationalisme et au patriotisme, l’internationalisme ainsi défini les suppose et ne tend à rien de plus qu'à les maintenir dans leurs justes limites en faisant disparaître ce qui pourrait les induire à s’en affranchir : besoin, intérêt ou occasion. II s’accorde ainsi avec la théorie scientifique du patriotisme. D’autre part, il n’est manifestement qu’une application de la loi de charité ou de fraternité humaine àlaquelleles sociétés, — nations ou autres, — sont soumises comme les individus, par la raison bien simple qu’elles ne sont autres choses que leurs membres eux-mêmes, considérés tous ensemble en tant qu’associés. On doit donc le regarder, non seulement comme légitime et raisonnable, mais encore comme obligatoire et salutaire.

Parmi ses multiples formes, par conséquent, celles qui répondent à la définition que nous venons de poser sont louables ; celles qui s’en écartent plus ou moins sont plus ou moins condamnables, soit qu’elles méconnaissent les droits des individus, des sociétés, des nations ou des Eiats ; soit qu’elles ne tiennent pas suffisamment compte de leurs besoins et de leurs intérêts légitimes ; soit qu’elles violent la loi de charité, en préconisant des moyens d’action que cette loi interdit ou en ne respectant pas l’ordre de préférence qu’elle établit pour chacun de nous entre les hommes en nous ordonnant de les aimer tous.

On aurait donc tort de parler toujours au singu-