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PARABOLES DE L’ÉVANGILE

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papes d’Avignon, 1305-1378 (Bibliothèque de l’Instilut canonique de l’Université de Strailiouig (vol. I). Paris, 1921).

G. MOLLAT.


PARABOLES DB LÉVANGILE. — I. Théorie UTTiinviHK DB LA PARABOLE. — I. Parabole et mâchai hébraïque. 1, Analyse du genre. 3. Obscurité relative de la parabole en général. 4. La parabole eva’igélique es/ particulièrement d’une interprétation laborieuse. 5. Sentiment de ta Tradition’a ce sujet. — II. Le bit i>k l"bnseiomembnt par paraboles. — I. Etat de la question, a..Sens du texte des Evangiles. 3. Commentaire traditionnel de ce même texte. 4. Les opinions des catholiques contemporains. — III. L’AUTHENTICITÉ DES PARABOLES. Oh l’a contestée. i. A raison de leur caractère allégorisant. a. A cause de l’état des textes, dans lesquels on a cru relever des remaniements et des adaptations postérieures.

Deux questions seulement intéressent ici l’Apolog ^étique : l’authenticité des Paraboles et le but de Jésus-Christ en les disant. Mais la réponse à faire dépend en partie de la théorie littéraire de la parabole évangélique.

I.Tbéorie littéraire de la parabole évangélique

1" Le terme de parabole revient cinquante fois dans le texte j> : rec du Nouveau Testament, savoir : quarante- huit fois dans les évangiles dits synoptiques, et deux fois dans l’épître aux Uébreux ( ! x, 9 ; XI, ig). Dans ces deux derniers passades, il prendle sens particulier de « figure prophétique », mais partout ailleurs il s’emploie pour signilier un mode d’enseignement, le plus caracléristiqi’.e des discours de Jésus-Christ.

La parabole évangélique a paru si achevée qu’elle est restée le type du genre, et c’est à elle qu’on pense quand il est question de parabole tout court. Ce n’est pas que Jésus-Christ ait inventé le discours parabolique, ni même la parabole proprement dite. Il a eu des précurseurs. Il va sans dire que c’est chez les Juifs, et non cher les Grecs qu’il convient de les rechercher. Sans parler de Salomon, qui garde dans la tradition juive la réputation d’un grand paraboliste, nombre de ceux qui ont écrit l’. cien Testament, prophètes ou moralistes, excellent à manier la parabole.

Dans la version grecque des Septante, le mot ttccox- ?o/i se rencontre quarante-sept fois, et le plus souvent il traduit l’hébreumâcvri/.Or.le m « c/(â/ hébraïque est une sentence renfermée dans deux stiques parallèles, qui le plus souvent se développent en une comparaison.

De l’eau fraîche pour celui qui a soif. Telle la bonne oouTelle Tenant d’un pave lointain (Proi.,

« V, 25).

Le mâchûlesl d’une compréhension très élastique, presque fluide. ombreuses sont ses variétés. Encore qu’elles ne se distinguent ])as nettement les unes des autres, on peut en énumérer une dizaine : la simple similitude, comme sont la plupart des sentences du livre des Proverbes ; le dicton(rîen., xxii, 14 ; Ezech., XII, aa) ; le proverbe (1 ïiois.x, la) ; l’énigme ou problème (yH^es, xiv, ia-14) ; l’exemple, mais en mauvaise part, comme nous disons devenir la fable, e’est-à-dire la risée (A’s., lxviii, la ; Deut., xxviii, 37) ; la parabole ou fable (Juges, ix, 7-15) ; l’allégorie (Èiech., xvii, 2-10 ; XIX, ixiii) ; et enûn, en un sens

moins rigoureux, la figure prophétique ou type biblique (Ps., Lxxvii, a ; cf. Hebr., tx, 9 ; xi, ig).

Dans, la littérature juive postérieure, notamment dans les apocalypses du livre d’Hénoch et du IV’livre d’Esdras ; puis et surtout dans le Talmud, on rencontre ces mêmes formes du mâchai. De tout temps, le discours [larabolique a été faniilitr aux Orientaux. St Jkrôme en faisait la remarque à propos des Syriens et des Palestiniens. « Familiare est Syris, et maxime Palæstinis, ad omnem sermonem saura parabolas jungere : ut quod per simplex præceptum teneri ab auditoribus non polest, per similitudinem exeniplaque teneatur. » In Matth., xviii a3 ; P.L., XXl, iSa..

2" Nulle part dans l’Ecriture, pas plus dans le Nouveau Testament que dans l’Ancien, nous n’avons les règles de la parabole. Ces règles ont sans doute existé, étant donné que le mâchai représentait chez les Hébreux l’art de bien dire. L’Ecclésiastique (xxviii, 33) met sur le même pied le jurisconsulte et celui qui « sait énoncer de fines sentences ». On devait s’exercer à faire et à expliquer le mâchai, puisque le même auteur fait observer que l’homme cultivé « pénètre les détours des sentences subtiles, cherche le sens caché des similitudes et s’applique à deviner les sentences énigmatiques » (xxxrx, a-3). Mais, à défaut d’une théorie littéraire toute faite (qu’on serait du reste bien étonné de rencontrer dans des textes d’un intérêt exclusivement moral et religieux), nous avons dans la Bible, et notamment dans l’Evangile, assez de paraboles, pour qu’il soit permis de tenter une analyse du genre.

Il est manifeste <|ue l’élément commun à toutes les variétés du mâchai est la mise en œuvre d’une comparaison. De là son équilibre, résultant de deux termes sj-métriques, aussi bien pour le fond que pour la forme. C’est ce que les mots eux-mêmes donnent clairement à entendre : mâchai et T : y.pei.Z : ii.Ti, tout comme -nxpitftiv., veulent dire similitude. Ils consistent essentiellement à rapprocher deux objets pour les comparer, de manière à comprendre l’un par l’autre. La légitimité du procédé se fonde sur la supposition, tacite mais non gratuite, qu’il y a unité dans les choses de ce vaste monde, que la vie intérieure des âmes, que la vie divine elle-même a de l’analogie avec le mouvement et la vie des êtres inférieurs, telle que l’expérience quotidienne nous la fait connaître. Instinctivement et universellement, les hommes sont persuadés que l’invisible se révèle dans le visible. C’est tout le fondement du symbolisme.

Les figures les plus primitives du langage, celles que les Grecs appellent tsottîi (ijue Quintilien traduit par verborum immutationes), seramènentendéflnitive à la comparaison. On commença par dire d’un homme vaillant qu’il était comme un lion. La métaphore était trouvée. Elle sort de la comparaison, ou plutôt elle n’est qu’une comparaison implicite : on affirme directement d’un objet les propriétés ou prérogatives d’un autre. Alors que la comparaison rapprochait, pour dériver la lumière de ceci sur cela ; la métaphore superpose, de manière que ceci transparaisse à travers cela.

Tout le monde convient que la parabole est une comparaison soutenue, développée en un récit Actif ; et que l’allégorie est une série de métaphores cohérentes pour donner à connaître un seul et même objet. Au reste la parabole et l’allégorie tendent pareillement à instruire en charmant : avec cette différence que l’allégorie est facilement plus descriptive. Avec les mêmes éléments on peut faire une simple similitude (qui sera parabolique ou allégorique), une parabole ou une allégorie. Le Christ, qui est